L’installation d’un Système de sécurité incendie |
Comment prévenir les accidents ?
Les incendies qui ont récemment eu lieu dans trois Ehpad français rappellent que le risque existe toujours. C’est parce qu’ils sont souvent accidentels que les départs de feu peuvent, le plus souvent, être maîtrisés. À condition de respecter scrupuleusement la réglementation en vigueur.
Trois incendies en Ehpad en quatre mois. Le dernier a eu lieu, en janvier dernier, à Thoissey (Ain) et fait un blessé, un pensionnaire victime d’un arrêt cardiaque avant d’être réanimé par les pompiers. Fin 2011, les résidents de deux autres établissements situés à Marseille et à La Rochefoucauld (Charente) n’ont pas eu autant de chance : neuf d’entre eux ont perdu la vie à cause des flammes ou des fumées. Des drames d’origine accidentelle mais qui confirment qu’aucun établissement n’est à l’abri du danger. Certains départs de feu surviennent dans les cuisines de l’établissement, comme ce fut le cas à Thoissey, d’autres dans les chambres. « De nombreux incendies sont causés par des bouillottes électriques restées branchées, des bougies oubliées ou des cigarettes mal éteintes. Les locaux sont toutefois aménagés pour qu’en principe, le feu ne se propage pas », explique Cyrille Gagnaire, pompier et responsable pédagogique au sein du centre de formation à la sécurité incendie Alertis.
Clapets d’aération et système électronique d’alerte incendie
Des normes draconiennes sont en effet énumérées dans l’arrêté du 19 novembre 2001 relatif au risque d’incendie et de panique dans les Établissements recevant du public (ERP) dits de type J, à savoir les Ehpad. Limitation du nombre d’étages pour faciliter l’évacuation, portes coupe-feu pour compartimenter chaque couloir, clapets au niveau des bouches d’aération pour contenir les fumées en cas de feu… La liste est précise. À cela s’ajoute l’obligation d’installer un Système de sécurité incendie (SSI). « Tous les détecteurs de fumée et systèmes d’alarme dispersés dans l’établissement sont reliés à un poste de contrôle, détaille Cyrille Gagnaire. Dès que l’un d’eux est activé, un voyant lumineux et un buzz se déclenchent au standard. Les clapets au niveau des bouches d’aération et les portes coupe-feu se rabattent automatiquement. La personne chargée de surveiller le système incendie doit alors immédiatement se rendre là où l’alarme s’est allumée pour voir ce qu’il en est. S’il y a vraiment un départ de feu, des mesures d’urgence doivent être prises. » Car tout va alors très vite : il ne faut que dix minutes pour que le feu se propage dans toute une chambre.
« Les stages permettent d’acquérir les bons réflexes. » |
Trois formations du personnel par an
La formation du personnel des Ehpad à l’utilisation de ce dispositif comme au maniement des extincteurs est obligatoire (article J35 de l’arrêté de 2001). L’objectif est de mieux gérer le stress et de rester efficace. Par exemple, un extincteur se vide en quinze secondes. Si le feu est déjà trop important, il est donc inutile de perdre du temps à l’utiliser. « Qu’une chambre soit touchée, cela peut arriver. Mais deux ou trois, c’est déjà trop : cela signifie qu’il y a eu trop de temps perdu, estime Cyrille Gagnaire. Les stages permettent d’acquérir les bons réflexes. » De telles formations doivent avoir lieu trois fois par an. Tout le personnel est concerné, des aides-soignants aux cuisiniers en passant par les jardiniers. Elles peuvent durer de quelques heures à une journée selon qu’il s’agit d’une première ou d’un rappel. Elle sont l’occasion d’apprendre ou de réviser les techniques de transfert dit horizontal.
« Le personnel doit amener les pensionnaires d’une zone touchée à une autre tout en restant au même étage, explique le formateur. Il faut en effet éviter le risque de rester bloqué dans l’ascenseur si l’électricité est coupée, voire de s’aventurer dans les escaliers où il sera difficile d’aider les résidents handicapés à descendre. Les portes coupe-feu et les clapets sont censés rendre chaque zone de l’étage hermétique aux flammes et aux fumées. Si le feu se propage, l’établissement sera alors totalement évacué avec l’aide des pompiers. »
Effectifs réduits la nuit, budgets serrés
Malgré ces stages, qui peuvent être suivis auprès d’un organisme agréé ou d’une personne titulaire d’une qualification spécifique intitulée Service de sécurité incendie et d’assistance aux personnes (SSIAP), un accident peut toujours survenir. En particulier, la nuit quand les effectifs sont réduits. « Lorsqu’ils y a quatre-vingts personnes âgées dépendantes à prendre en charge mais seulement une ou deux personne de garde à ce moment-là, la réaction peut être plus longue. Surtout si, au moment de l’alerte, elles sont en train de s’occuper d’un résident », reconnaît Françoise Toursière, directrice de la Fédération nationale des associations de directeurs d’établissements et services pour personnes âgées (FNADEPA). Et si un protocole écrit doit être établi afin de réexpliquer comment réagir en cas d’incendie, notamment au personnel remplaçant, ce n’est pas toujours suffisant en cas d’urgence. Les budgets des Ehpad sont en outre serrés. « Les directeurs d’Ehpad doivent composer avec les dotations qu’ils perçoivent, rappelle Françoise Toursière. Ils souhaitent tous multiplier les formations relatives à la sécurité incendie ou même à la bientraitance mais ils n’ont pas tous le budget pour. »
Autre difficulté : de nombreux résidents en Ehpad sont atteints de troubles cognitifs. « En moyenne, 80 % des pensionnaires des Ehpad sont atteints de la maladie d’Alzheimer ou d’une maladie assimilée, souligne la représentante syndicale. Ils ne se souviennent pas nécessairement des consignes d’évacuation ni même des consignes de sécurité relatives aux appareils électriques, par exemple. » Ils ont par ailleurs le droit de fumer dans leur chambre, laquelle est considérée comme un espace privé. Seule restriction : ils ne peuvent pas allumer de cigarette dans leur lit pour des raisons de sécurité. C’est donc au personnel d’être particulièrement vigilant. À noter que ces subtilités ainsi que tous les impératifs liés à la sécurité incendie, tels que les exigences en matière de vérification des installations électriques et des installations incendie, sont rappelés dans divers guides édités notamment par la FNADEPA ou encore la Fédération française du bâtiment.