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Rencontre Jacques Wattiaux Non classé

Ce qui m’anime, c’est que les personnes restent actrices et citoyennes

Jacques Wattiaux dirige l’établissement Jean Menu à Douai (59). Rencontre avec un homme de conviction, avec lequel la rédaction d’Ehpad magazine est heureuse d’ouvrir la nouvelle rubrique « Rencontre » qui prendra désormais place régulièrement dans nos colonnes.

Le fait que Jacques Wattiaux dirige depuis une quinzaine d’années l’association douaisienne la Maison de l’Aide à la Vie (MAVie) et, depuis dix-huit mois, l’un de ses deux Ehpad, la Résidence Jean Menu, n’est pas vraiment dû au hasard. « J’ai eu la chance de naître dans un milieu engagé socialement où le sens de l’autre était très présent », reconnaît-il. Un creuset qui a fait de lui un jeune bénévole aux Petits frères de pauvres avec lesquels il a « visité des personnes âgées à domicile et en hospice comme on disait à l’époque ». Des personnes âgées qu’il accompagnait également en centre de vacances. Une telle expérience a eu raison d’un début de carrière professionnelle effectué dans le commerce. « J’ai rapidement bifurqué vers le monde associatif où j’ai d’abord commencé par m’occuper des personnes migrantes et de leur famille. Et quand l’opportunité de gérer une maison de retraite s’est présentée, cela m’a semblé naturel. »

Tendre vers du sur mesure           

« Mais on ne s’improvise pas pour autant directeur d’Ehpad, précise-t-il. On a beau avoir de belles idées, il faut parvenir à emmener l’équipe vers un projet et faire en sorte qu’elle ait envie de se l’approprier. Tout cela demande un apprentissage. » La force de Jacques Wattiaux est de ne pas être qu’un gestionnaire. Vis-à-vis de son équipe mais aussi des résidents, il sait quel sens il veut donner à son action. « En tant que directeur, on peut ne pas vouloir faire de vagues ou tout vouloir neutraliser en faisant tout soi-même. Ou bien, on peut dépenser du temps et de l’énergie pour faire en sorte qu’il y ait un collectif qui s’investisse. C’est cette voie que j’ai résolument choisi d’emprunter. » Un collectif qu’il souhaite au service d’un objectif à la fois simple et ambitieux : « Ce qui m’anime, c’est que les personnes hébergées puissent rester citoyennes et actrices même au sujet des soins. Ce sont là de grands mots mais nous tentons vraiment de les mettre en œuvre. Pour y parvenir, nous essayons le plus possible de faire du sur mesure dans un cadre collectif. »

Gérer les attentes de résidents exigeants

Un projet qui correspond parfaitement à la population accueillie à la Résidence Jean Menu. Une résidence services créée dans les années quatre-vingt-dix et devenue Ehpad en 2003 mais dont la population est restée « haut de gamme ». À l’origine, en effet, un groupe de cadres supérieurs et de chefs d’entreprises du Douaisis ne trouvant pas à proximité de chez eux le type d’établissement dont ils souhaitaient disposer pour leurs vieux jours. Résultat, l’établissement est constitué d’une centaine d’appartements de quarante à quatre-vingts mètres carrés et la mensualité tourne autour de 3 000 euros, soit un bon tiers au dessus de la moyenne nationale. Ce qui ne change pas le fait que l’établissement se situe dans la moyenne nationale à la fois concernant le taux d’encadrement, avec 0,54 personnel par résident, et l’âge moyen de la population résidente qui est de 87 ans.

Mais, plus que les conditions matérielles, ce sont avec les attentes et les habitudes des résidents qu’il faut composer. « C’est une population qui, toute sa vie, a eu l’habitude du commandement, qui a des exigences et qui veut les choses immédiatement. Si cela nous pousse à être réactifs et que nous faisons tout pour que l’institution s’adapte à la personne, nous devons aussi accompagner les résidents dans l’apprentissage de la collectivité. »

Ne pas abdiquer sa liberté

Un apprentissage qui n’est facile pour personne. « Entrer en maison de retraite n’est pas neutre. Comme je le dis souvent, je souhaite à chacun de finir sa vie chez lui. Mais ce n’est pas toujours possible. Et là, heureusement que les maisons de retraite médicalisées existent. Prendre la décision d’y entrer est un moment délicat. D’ailleurs, si j’assure moi-même les rendez-vous d’information avec les personnes qui viennent se renseigner, c’est autant pour des raisons commerciales que de respect et d’accompagnement des gens. J’essaie de les aider à comprendre que l’on peut entrer dans un lieu collectif sans abdiquer sa liberté. Particulièrement chez nous, l’établissement fonctionne plus comme une addition d’indépendances que comme une collectivité. »

Grégoire Sévan

 

De la résidence services à l’Ehpad

Au départ  résidence services en 1990, la Résidence Jean Menu1 est devenue un Ehpad en 2003. Elle a gardé de sa première vie la volonté que les résidents s’y sentent davantage à domicile qu’à l’hôpital. « Nous avons conservé les décorations du type appartement et maison en faisant attention à mettre du matériel médicalisé le plus intégré possible », souligne Jacques Wattiaux. « Mais nous fonctionnons bien selon le mode d’un Ehpad avec un service d’hébergement, de restauration et de soins. Nous disposons d’un médecin coordinateur, d’une infirmière coordinatrice, d’aides-soignantes et de trois postes d’infirmière. Nous avons aussi un psychologue et un ergothérapeute à temps partiel. Nous avons donc les moyens d’avoir des discussions pluridisciplinaires. Et tout le monde est mobilisé. Les informations sur les résidents que nous remonte le personnel qui sert à table ou qui fait le ménage sont très précieuses pour le suivi que nous assurons auprès d’eux. »

Sur le plan des soins, la Résidence Jean Menu dispose d’une unité Alzheimer et d’un accueil de jour. Elle a également noué un partenariat avec la structure HAD (Hospitalisation à domicile) du territoire tout comme avec la plate-forme santé du Douaisis au travers de son pôle de soins palliatifs. « Nous ne pouvons pas tout assurer mais nous faisons tout pour éviter les hospitalisations », assure le directeur.

1 Résidence Jean Menu, rue du Kiosque, 59500 Douai.

 

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