Le droit français impose à l’employeur, au travers de l’application de principes généraux de prévention des risques, des obligations de sécurité et de résultat au regard de la santé du salarié au travail.
Pour atteindre ce résultat, l’employeur se doit de mettre en place des actions de prévention des risques professionnels l’obligeant notamment à établir, depuis janvier 2012, des fiches d’exposition aux risques qui pourront avoir des conséquences sur la date de départ à la retraite.
La prévention de la pénibilité au travail
Depuis la loi du 9 novembre 2010 portant réforme des retraites, toute entreprise, quelle que soit sa taille, se doit d’évaluer les facteurs de pénibilité au regard d’une liste de dix facteurs fixée par décret1.
Au regard de cette liste, l’employeur se doit d’apprécier, selon un système de cotation objective qu’il aura défini lui-même, si les salariés pris individuellement sont soumis ou non à un ou plusieurs facteurs de pénibilité. La proportion de salariés exposés à ces facteurs est consignée en annexe du document unique d’évaluation des risques alors que chaque salarié bénéficie d’une fiche d’exposition au risque selon un modèle défini par arrêté ministériel. Par ailleurs, le défaut d’élaboration ou d’actualisation de cette fiche est puni d’une contravention de cinquième classe en autant d’exemplaires qu’il y a de travailleurs concernés.
Un projet de loi en cours de discussion au Parlement et relatif à la retraite prévoit que les seuils de déclenchement de la pénibilité seront désormais fixés par décret mettant ainsi fin à la liberté d’appréciation de l’employeur, ce qui l’obligera sans doute à revoir, à terme, les dispositifs en place.
La reconnaissance de la pénibilité comme moyen d’anticiper son départ à la retraite
Depuis le premier juillet 2011, un salarié bénéficiant d’un taux d’incapacité permanente inférieur à 20 % mais au moins égal à 10 % peut faire valoir, notamment afin de bénéficier d’un départ à la retraite dès 60 ans, une exposition pendant un certain temps (17 ans) à des facteurs de pénibilité au titre de contraintes physiques marquées telles que la manutention manuelle de charges, les postures pénibles, des rythmes de travail susceptibles de laisser des traces durables identifiables ou irréversibles sur la santé (travail de nuit, en équipes successives alternantes, travail répétitif…), sous réserve de l’avis d’une commission pluridisciplinaire constituée auprès de chaque Caisse et s’imposant à cette dernière.
Cette possibilité incitera un salarié à faire sanctionner le défaut de mise en œuvre des fiches de pénibilité ou à contester le diagnostic de l’employeur quant à son exposition aux facteurs de risque.
Un projet de loi garantissant l’avenir et la justice du système de retraites, voté en première lecture à l’Assemblée nationale le 15 octobre 2013, prévoit l’établissement au profit de chaque salarié d’un compte personnel de prévention de la pénibilité. Ainsi, un salarié exposé à un ou plusieurs des dix risques au-delà des seuils d’exposition qui seront définis par décret aura droit à l’attribution de points sur son compte personnel de prévention de la pénibilité.
Le nombre de points sera fixé par décret ainsi que le nombre maximum de points qu’un travailleur pourra acquérir au cours de sa carrière. Le travailleur pourrait utiliser ses points notamment pour le financement d’une majoration de durée d’Assurance vieillesse (acquisition de trimestres), l’âge d’ouverture du droit à une pension étant alors abaissé à due concurrence des trimestres ainsi attribués.
Pour conclure, l’existence de facteurs de pénibilité et leur traduction dans l’entreprise par l’employeur ne seront pas sans conséquence sur l’obligation de résultat pesant sur l’employeur en matière de santé au travail mais également, indirectement, sur l’âge de départ à la retraite, a fortiori dans un contexte de rallongement des durées de cotisation.
Gageons que les travailleurs seront davantage attentifs à l’appréciation par leur employeur de la pénibilité de leur travail.
1 Art. D.4121-5 du Code du travail