Envisagée par la future loi, la question du reste à charge est épineuse. Car si les responsables s’accordent sur le principe d’un allégement des charges qui pèsent que le résident, cela ne peut se faire au détriment de la qualité des services.
Stéphane Mantion et Anne Pascaud, Croix-Rouge. Respectivement Directeur général et responsable filière personnes âgées.
« Pour réduire le reste à charge, nous essayons déjà de mutualiser et de regrouper les achats dans le domaine foncier ou, par exemple, en ayant le même prestataire de restauration. Nous avons une implantation territoriale éclatée. Aussi avons-nous déjà mis en place une centrale d’achats. Les économies réalisées sont au seul bénéfice du reste à charge. C’est une très bonne chose mais il faudrait aussi penser à mieux financer le reste, notamment les soins ou l’immobilier par le biais d’aides. Certains dispositifs existent en régions pour soutenir l’investissement, les travaux publics, les équipements. »
Florence Arnaiz-Maumé, Synerpa.
« D’abord, il faut rappeler, à la suite de Pascal Champvert, le principe de base : « non, la maison de retraite n’est pas trop chère ». Un tarif s’élevant en moyenne à 65, voire 70 euros par jour n’est pas cher car il s’agit d’un hébergement vingt-quatre heures sur vingt-quatre, sept jours sur sept. En outre, plus de 50 % du budget d’un établissement sont affectés à la masse salariale, laquelle augmente de 2 % par an. L’Assurance maladie donne 30 euros par jour alors qu’elle en donne 50 en Italie.
Il existe trois types de solutions. D’abord, transférer une partie des charges de l’hébergement vers d’autres financeurs (Conseils généraux, Assurance maladie…) et faire appel à la solidarité nationale pour renforcer les financements publics en asséchant le financement privé. Ensuite, améliorer la solvabilisation du tarif hébergement : il faut créer un deuxième dispositif social pour les classes moyennes qui ont entre 1 000 et 2 000 euros de ressources par mois et peu de patrimoine. Enfin, il y a l’idée que les tarifs baisseront mécaniquement en créant des établissements plus grands (130 lits). Plus les structures sont petites, plus les tarifs grimpent, a fortiori si l’on veut de la qualité : c’est mathématique. On peut aussi souscrire des baux emphytéotiques sur 50 ans et des prêts bonifiés permettant de réduire sensiblement la facture. »
Adeline Leberche, Fehap.
« Il faut rester prudent sur la baisse du reste à charge. Les taux d’évolution des budgets sont très faibles et lorsque nos établissements génèrent des marges, elles sont reprises par les tarificateurs. Il y a donc de grandes difficultés à investir, entretenir ou rénover le bâti. C’est donc le prix de journée payé par le résident qui peut le permettre. Si on ne se saisit pas très rapidement de la problématique de l’investissement dans les Ehpad, il ne faudra pas demander par ailleurs de maintenir un reste à charge au même niveau ou, pire, de le faire baisser. Nous proposons une solution temporaire : la possibilité de signer des Contrats pluriannuels d’objectifs et de moyens (Cpom) avec les tarificateurs. Il y aurait alors contractualisation sur une dotation financière acquise pour cinq ans avec une liberté d’affectation des excédents tout en étant responsable des déficits. C’est un modèle simple dont l’outil existe puisque le Cpom est prévu dans le Code de l’action sociale et des familles. Pour l’instant, l’administration centrale en bloque le développement. C’est pourtant un outil très développé dans le champ du handicap et qui fonctionne extrêmement bien. Selon nous, cet outil permettra de passer les années difficiles qui sont devant nous. »
Élodie Hemery, FHF.
« La question du reste à charge est liée à la question de la création d’un cinquième risque. Il y a là un vrai problème de solvabilisation. Le système de tarification tel qu’il existe fait peser sur les résidents des charges qu’ils n’ont pas à assumer. Les coûts et les charges qui pèsent sur chaque section ne sont pas forcément pertinents. On doit pouvoir proposer sur l’ensemble du territoire des solutions de prise en charge – que ce soit à domicile, en établissement ou dans le cadre de plates-formes – qui soient accessibles géographiquement et financièrement pour les personnes. »