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Des sujets d’inquiétude pour les petites entreprises Non classé

Alors que la loi sur la formation professionnelle vient d’être adoptée et que les partenaires sociaux ainsi que l’opposition l’accusent d’être un « fourre-tout complexe » et un « TGV », car examinée en procédure accélérée, les professionnels du secteur donnent leur avis et précisent quels sont les points qui retiennent leur attention.

 

 

 

Issu de l’Accord national interprofessionnel (ANI) du 14 décembre 2013, le projet de loi sur la formation professionnelle, l’emploi et la démocratie sociale a été adopté juste avant la suspension de la session parlementaire en raison des élections municipales.

 

CPF et entretien individuel

L’une de ses mesures phare concerne la création, à partir du 1er janvier 2015, pour les salariés du privé, d’un Compte personnel de formation (CPF) qui suivra les professionnels tout au long de leur vie active, y compris en cas de perte d’emploi, leur permettant ainsi de se requalifier pour mieux accéder à un nouvel emploi. Ce système, qui remplace le Droit individuel à la formation (Dif), est positif, selon Carole Falguières, responsable du pôle social du Synerpa (Syndicat national des établissements et résidences pour personnes âgées) : « On ne peut accueillir que positivement une loi qui vise à faire bénéficier au plus grand nombre de l’accès à la formation, notamment avec la création du CPF qui augmente la durée des heures de formations, de 120 à 150 heures sur huit ans. Reste un questionnement concernant le transfert du Dif vers le CPF et de leur financement respectif. » Pour Philippe Testa, responsable du pôle ingénierie, recherche et suivi pédagogique à la direction de la formation de la Croix-Rouge, le CPF est révélateur d’une individualisation de la formation, chacun étant acteur de sa formation tout au long de sa vie. S’inspirant des accords européens de Bologne, ce dispositif invite les salariés à remettre en question leurs savoirs afin de les compléter et, ainsi, de répondre au mieux à l’évolution de leur environnement.

Le texte de loi prévoit également un « conseil en évolution professionnelle » dispensé gratuitement par le Pôle emploi ou les Missions locales ainsi que l’obligation d’instaurer, tous les deux ans, un entretien professionnel avec l’employeur. « C’est pertinent car nous avons peu l’occasion de faire le point avec les professionnels sur leur niveau de motivation, leur adaptation au poste ou encore l’évolution de leurs pratiques au regard du public accueilli et des orientations fixées par l’établissement, commente Isabelle Barges, Directrice de la qualité de vie à la Fédération nationale avenir et qualité de vie des personnes âgées (Fnaqpa). Ces bilans permettent de réorienter des personnes et de réadapter leur environnement professionnel. »

 

Inquiétude sur le financement

Par-delà ces mesures offrant a priori des perspectives d’amélioration du système de formation, véritable levier d’attractivité pour les Ehpad en matière de recrutement, le texte de loi ne supprime pas pour autant toutes les zones d’ombre, notamment concernant le financement, comme le souligne Sylvie Amzaleg, coordonnatrice du pôle ressources humaines et Directrice des relations du travail à la Fédération des établissements hospitaliers & d’aide à la personne (Fehap) : « Nous souhaitons nous assurer que les établissements auront toujours les moyens budgétaires de financer des formations dont certaines sont très coûteuses, comme celles d’aide-soignant ou d’infirmier. Nous avons donc alerté les pouvoirs publics de cette inquiétude. » Une crainte partagée par le secteur privé, comme le confirme Carole Falguières, du Synerpa :  « Le nouveau financement de la formation professionnelle pourrait constituer la limite de cette loi. D’après ce que nous observons, il pourrait en effet donner le choix aux entreprises de gérer leur plan de formation en interne, ce qui remettrait en question notre système actuel de mutualisation et réduirait par là même significativement les fonds au bénéfice des petites entreprises pour former leurs salariés ».

 

Interrogation sur le tutorat

Autre sujet d’inquiétude pour Isabelle Barges, de la Fnaqpa, la notion de tutorat pour les contrats de génération, un dispositif d’aide à l’emploi visant à créer des binômes jeune-senior pour encourager l’embauche des jeunes : « Si le principe est intéressant puisqu’il permet de transmettre des savoir-faire et des savoir-être, je m’inquiète toutefois de sa faisabilité. Quid de la disponibilité des professionnels et de la prise en charge des personnes âgées pendant ce temps-là ? Et comment ces tuteurs seront-ils soutenus méthodologiquement dans ce nouveau rôle ? » Plus que le tutorat, c’est l’idée même de ce contrat de génération qui interroge la Fehap. « Ce dispositif est important car il vise à financer des formations pour les personnes très éloignées de l’emploi par le biais du fonds de sécurisation des parcours professionnels, relève ainsi Sylvie Amzaleg. Pour autant, nous avons besoin de professionnels qualifiés car un certain nombre d’emplois sont réglementés dans notre secteur.» C’est pourquoi, selon Brunot Daret, responsable du pôle prospective et développement à la direction de la formation de la Croix-Rouge, cette mesure doit s’accompagner d’une phase de préqualification lors de laquelle on s’assure de la remise à niveau et du travail préalable sur soi du candidat. « Parfois négligée, cette phase est une pièce maîtresse de la stabilisation des personnels et de leur évolution vis-à-vis de populations fragilisées. » Au registre des espoirs et des craintes face à l’actuel texte de loi, il faut également attendre que celui-ci soit, après promulgation, décliné en accords de branche. Il n’en reste pas moins important pour les directeurs d’Ehpad de suivre son évolution qui, selon toute vraisemblance, bouleversera le système actuel.   

 

 

Les autres mesures de la loi

> Les contrats d’apprentissage pourront être conclus dans le cadre d’un Contrat à durée indéterminée (CDI) tandis que les missions des Centres de formation d’apprentis (CFA) seront renforcées.

> Concernant le financement de l’ensemble des dispositifs de formation, une contribution unique pour les entreprises sera créée (contre trois actuellement) allant de 
0,55 % (pour les sociétés de moins de 10 salariés) à 1 % (plus de 50) de la masse salariale. Une partie de ces fonds sera mutualisée au profit des petites entreprises.

> Alors que seule la voie pénale était jusqu’ici envisagée, les inspecteurs du Travail pourront infliger des amendes aux entreprises via un nouveau dispositif de sanction administrative.

 

E-learning et présentiel :  le duo gagnant

Les fédérations préconisent majoritairement une formation mixte basée sur une formation présentielle accompagnée d’éléments plus théoriques via le e-learning ou formation en ligne. « Le e-learning permet de consolider, voire d’améliorer un certain nombre de connaissances acquises en amont dans le cadre d’une formation présentielle, explique Isabelle Barges, de la Fnaqpa. En outre, la personne concernée pourra également faire bénéficier à ses collègues des éléments envoyés à distance. » Pour Sylvie Amzaleg, de la Fehap, cette combinaison est aussi intéressante pour les cadres car ils s’absentent peu grâce au e-learning tandis que le présentiel permet un échange avec leurs pairs et un contact direct avec le formateur. Et si les Opca (Organismes paritaires collecteurs agréés ) montraient jusqu’ici des réticences à financer ces formations à distance, « d’après les textes actuellement en discussion, note Bruno Daret, de la Croix-Rouge, les choses pourraient s’améliorer: les programmes de formation seront plus adaptés aux parcours de la personne, à ses objectifs et à ses besoins. »


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