Le 29 mai 2013, l’Ehpad strasbourgeois Emmaüs-Diaconesses Koenigshoffen, géré par l’association Emmaüs-Diaconesses, a reçu le Trophée national du développement durable en établissement de santé et médico-social, catégorie “meilleur démarrage dans le développement durable”. Stéphane Buzon, Directeur général de l’association et Directeur de l’Ehpad récompensé, explique les actions qu’il a mises en œuvre en termes de tri des déchets, d’achats responsables ou encore de gestion de l’eau.
Ehpad magazine : Comment vous êtes-vous lancé dans une démarche de développement durable ?
Stéphane Buzon : L’engagement de l’Ehpad Emmaüs-Diaconesses Koenigshoffen en matière de développement durable n’est pas nouveau : l’établissement dispose en effet d’une pompe à chaleur depuis 1998, pratique le tri sélectif depuis 2006 ou encore utilise des produits d’entretien éco-responsables en cuisine, en blanchisserie et en service hôtelier depuis 2012, exception faite des désinfectants qui, par nature, ne sont pas éco-responsables. Pour aller plus loin, nous avons décidé, avec l’aide d’un éco-conseiller, de définir une politique globale et structurée de développement durable et de mettre en place des projets concertés et pertinents aux yeux de tous. Cela s’est traduit par la création d’un Comité de pilotage sur le développement durable réunissant des membres du personnel, des résidents, des représentants des familles dont la Présidente du Conseil de la vie sociale (CVS) et des membres du Conseil d’administration de notre association.
E. M. : Quel rôle à joué cet éco-conseiller ?
S. B. : Il nous a contactés dans le cadre de sa formation pour effectuer un stage au sein de notre Ehpad. Ainsi, de mai à octobre 2012, il nous a incités à réaliser plusieurs diagnostics : enquêtes internes, analyses des données existantes, contacts avec les partenaires et collectivités extérieures. Il nous a aidés à rédiger une charte du développement durable dans laquelle l’Ehpad affirme qu’il considère son engagement en faveur du développement durable comme une contribution centrale à ce qui est sa première priorité : la qualité de l’accueil et de la prise en charge des résidents. Il nous a également soutenus pour la création d’une lettre mensuelle intitulée “Lettre de la maison de retraite verte”. Elle porte chaque mois sur une thématique différente comme l’éco-responsabilité ou le gaspillage alimentaire. Elle est à disposition des résidents et est envoyée aux familles, aux membres du personnel et aux administrateurs de l’association. Il nous a également aidés à organiser le 50e anniversaire de l’Ehpad autour du thème “la maison de retraite verte”. Il n’est plus stagiaire aujourd’hui mais nous continuons à travailler avec lui dans le cadre de vacations afin de faire perdurer nos actions.
E. M. : Le développement durable inclut la notion de bien-être des personnes résidant ou travaillant en Ehpad. Quelles ont été vos actions sur ce point ?
S. B. : Nous avons construit un garage à vélos sécurisé et en bois pour notre personnel et proposé à un berger de laisser ses moutons brouter sur les 2,5 hectares de notre parc. Cela évite le recours à des tracteurs bruyants et polluants pour tondre et offre une animation pour les résidents et leurs petits-enfants. Nous avons également implanté 30 ruches au fond de notre parc, gérées par un apiculteur. Nous lui rachetons son miel pour en revendre une partie, en consommer en interne et en offrir à certaines occasions. Et, il y a quelques semaines, nous avons adhéré au concept de “La ruche qui dit oui !”. Il repose sur l’idée de commander des produits locaux de type fruit, légume et fromage via un site web (www.laruchequiditoui.fr) puis de les récupérer au sein d’une ruche, c’est-à-dire un lieu de livraison et de distribution des produits. Nous avons accepté – selon des règles que nous avons pu définir – de devenir nous-mêmes une ruche. À ce jour, plus de 70 personnes, qu’il s’agisse de résidents et de leurs proches, de salariés ou de particuliers résidant à proximité, se sont inscrits et viennent chercher leurs produits au sein de l’Ehpad.
E. M. : Quels sont vos prochains objectifs ?
S. B. : Nous avons reçu notre Trophée comme une belle récompense du travail accompli mais aussi et surtout comme un encouragement à poursuivre nos actions. Depuis, nous avons ainsi, au sein de notre association, signé la charte du Parc naturel urbain (PNU) de Strasbourg et, bientôt, la charte de la biodiversité de cette même ville. Nous envisageons aussi d’utiliser l’eau du robinet pour la boisson en lieu et place de l’eau en bouteille. Ce choix, en voie de concrétisation, permettra, au travers de l’installation de fontaines contenant chacune un filtre, de réduire de manière significative nos déchets et, à terme, nos coûts liés à l’enlèvement des ordures ménagères puisque ceux-ci seront a priori bientôt proportionnels au poids ou au volume de ces dernières. Enfin, nous avons répondu présent lorsque la communauté urbaine de Strasbourg a lancé une opération à l’horizon 2015 visant à réduire les gaspillages alimentaires et nous travaillons avec les Conseils généraux du Haut-Rhin et du Bas-Rhin, l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (Ademe) et une association pour passer de 0 à 10 % de couches lavables et ainsi réduire le volume de nos ordures ménagères de 7,5 %.
E. M. : Cela a-t-il un coût ?
S. B. : Deux legs de personnes attachées à notre communauté religieuse1 nous ont notamment permis de construire le garage à vélos et de réaménager notre parc afin de créer des espaces de jardinage pour les résidents, par exemple. Sinon, l’appel à l’apiculteur et au berger ne coûte rien puisque ces derniers apportent eux-mêmes leur matériel : les ruches ou, dans le cas du berger, l’enclos. L’achat de fontaines nécessite un investissement de départ mais permet à terme de faire des économies sur les frais d’enlèvement des ordures ménagères. Il est également utile, pour chaque projet, de s’adresser à des entreprises, des mécènes ou des politiques qui pourraient être intéressés par l’idée de s’associer à un projet en lien avec le développement durable. L’important est que le projet en question soit concret, opérationnel et lisible.
1• L’association Emmaüs-Diaconesses est issue d’une œuvre protestante privée.
Du Trophée à l’Anap
Les Trophées du développement durable mettent à l’honneur des établissements sanitaires ou médico-sociaux pour leur politique en faveur du développement durable. Suite à l’obtention de l’un de ces Trophées, l’association Emmaüs-Diaconesses (gestionnaire de trois Ehpad) a été sollicitée par l’Agence nationale d’appui à la performance des établissements de santé et médico-sociaux (Anap) pour siéger au sein du Bureau de son cercle de performance relatif au développement durable. Créé en mars dernier, ce cercle a vocation à permettre un partage d’expériences et une promotion des bonnes pratiques entre les secteurs sanitaire et médico-social.
Egalement au sommaire du dossier
> Passer à l’ère du développement durable : un pari sur l’avenir [lire]
> Le développement durable en Ehpad, mode d’emploi [lire]