Attendu depuis plusieurs mois, le Plan maladies neurovégétatives (PMND) 2014-2019 a été présenté par le Gouvernement le 22 novembre. Il succède au Plan Alzheimer 2008-2012, ce qui signifie qu’il concerne désormais plusieurs pathologies. De leur côté, les établissements vont être davantage sollicités.
Pour la première fois, ce Plan inclut d’autre pathologies que la maladie d’Alzheimer, en l’occurrence la maladie de Parkinson qui affecte 150 000 personnes en France ainsi que la sclérose en plaques qui en touche 85 000. « Ce changement d’approche doit permettre de créer davantage de synergie et de rassemblement autour d’une problématique commune, celle de la protection neuronale », justifient les auteurs du Plan. En somme, « une nouvelle étape va être franchie » à la fois en créant une dynamique globale en matière de recherche de soins et d’accompagnement mais aussi en misant sur les caractéristiques communes de ces Maladies neurodégénératives (MND). Le tout dans le cadre de la Stratégie nationale de santé et de la Stratégie nationale de recherche, avec trois objectifs en point de mire : améliorer le diagnostic et la prise en charge des malades ; assurer la qualité de vie des malades et de leurs aidants ; enfin, développer et coordonner la recherche.
L’essentiel des préconisations relatives aux Ehpad concerne l’axe 1 du Plan : « Soigner et accompagner tout au long de la vie et sur l’ensemble du territoire ». Les pouvoirs publics insistent tout d’abord sur la nécessité de renforcer la qualité et la sécurité des soins. L’une des pistes retenues est le développement des Unités cognitivo-comportermentales (UCC) et de mieux les intégrer à la chaîne du soin. Elles sont en effet rattachées à un Service de soins de suite et de réadaptation (SSR) qui prend en charge, pour un temps limité, des patients en situation de crise, l’objectif étant leur retour vers leur lieu de vie habituel (UHR, Ehpad…) Dans la mesure où elles ont vocation à accueillir des patients atteints de la maladie Alzheimer ou d’une pathologie comportementale à un stade aigu n’autorisant pas une prise en charge dans des structures habituelles, il serait opportun de prévoir dans le cahier des charges des UCC, dont le nombre est appelé à augmenter, la formalisation de partenariats avec les Ehpad. Et ce, non seulement afin de structurer la filière mais aussi d’accroître les compétences des équipes des Ehpad par le biais de formations, de conseils etc.
Poursuivre le déploiement des Pasa et des UHR
Il convient également de « lever les freins permettant l’accès à une prise en charge hospitalière à domicile aux personnes atteintes de MND et ce, quel que soit son lieu de vie ». D’où la nécessité de développer les coopérations entre d’un côté l’Hospitalisation à domicile (HAD) et les équipes mobiles et, de l’autre, les Ehpad.
Au chapitre d’un meilleur accompagnement de la fin de vie, le rapport ne néglige pas la dimension sonante et trébuchante en rappelant qu’il est impératif d’intégrer dans les travaux en cours sur la rénovation des outils de tarification des Ehpad, les problématiques inhérentes aux personnes atteintes de MND. Et ce, en incluant les résidents de moins de 60 ans touchés par ces pathologies et en diligentant, auprès du comité scientifique en charge de la rénovation des outils Aggir et Pathos, une étude des besoins des résidents jeunes. Par ailleurs, il s’avère crucial d’assurer la continuité des soins et l’accès aux prises en charge des résidents « en levant les freins financiers à la prise en charge de certains traitements (dispositifs médicaux et médicaments) ». Des freins qui, parfois, vont jusqu’à remettre en cause l’admission au sein des Ehpad. Pour éviter ce genre d’impasse, des négociations doivent être engagées avec l’Assurance maladie pour « permettre la prise en charge en dehors de la dotation globale de soins des Ehpad avec ou sans PUI de certains médicaments et dispositifs médicaux ». Sans compter, dans le même ordre d’idée, la réalisation d’une enquête sur les difficultés propres à l’accueil des résidents parkinsoniens.
L’accompagnement passe en outre par la « poursuite du déploiement des Pôles d’accompagnement et de soins adaptés (Pasa) et l’inscription de cette offre au sein des filières de soins et d’accompagnement de droit commun ». En clair, il s’agit d’augmenter le nombre de Pasa en Ehpad et de les doter des ressources humaines (ergothérapeutes, psychomotriciens etc.) dont ils ont besoin. De même, le rapport recommande-t-il une hausse du nombre d’Unités d’hébergement renforcé (UHR) en Ehpad afin, là encore, de constituer un maillage territorial homogène. De surcroît, il serait souhaitable d’élargir les critères d’entrée en UHR au-delà des profils actuellement ciblés mais aussi de « mieux identifier leurs objectifs de soins et d’accompagnement par rapport à l’ensemble des unités sécurisées existantes (Cantous, unité Alzheimer) et aux UCC dans une logique d’amélioration de l’orientation et de complémentarité des réponses ».
Faire mieux avec ce que l’on a déjà
Il apparaît également important, pour les auteurs du Plan, « d’adapter et de mieux organiser l’offre en accueil de jour et en hébergement temporaire pour diversifier les solutions d’accompagnement en soutien du domicile » afin de « créer des pôles de ressources bien identifiés capables de proposer des réponses adaptées à la diversité des groupes de personnes ». Ce qui implique notamment la diversification des formules d’accueil et des réponses séquentielles (haltes-répit…), la formalisation par les établissements de véritables projets de services pour mobiliser les bonnes compétences mais aussi, détail qui a son importance, l’évolution du formulaire unique (Cerfa) de demande d’admission en Ehpad pour y faire figurer les demandes d’admission en accueil de jour et en hébergement temporaire.
Enfin, et c’est là la tendance politique du moment, il s’agit de « favoriser l’intégration des réponses sanitaires, médico-sociales et sociales au sein de véritable parcours de santé ». Par exemple, en « développant l’offre médico-sociale sur la base d’une gamme de services portés par des appels à projets transversaux ». C’est le cas des places réservées aux malades d’Alzheimer en Ehpad ou encore des hébergements temporaires et des accueils de jour voire de l’organisation de relais d’aide aux aidants au sein des Ehpad. Avec, à la clef, la mise en place de plates-formes de services sous l’égide des ARS. Ce qui requiert, au préalable, un diagnostic territorial des besoins non couverts en matière de MND que les Ehpad auront vocation, comme d’autres acteurs, à satisfaire. Et nul doute qu’ils seront sollicités pour cela.
Mais pénurie oblige, à l’heure « d’identifier les ressources les plus adaptées aux besoins spécifiques des personnes malades au sein de l’offre en établissements médico-sociaux », le rapport ne prône pas de créer de nouveaux établissements spécialisés mais de faire mieux avec ce que l’on a déjà. En somme, de cibler des établissements et des services ressources sur un territoire donné et de décliner des objectifs organisationnels et de prise en charge par structure dans le cadre de la contractualisation (conventions tripartites etc.). Les Ehpad savent désormais à quoi s’attendre.
Alexandre Terrini
Un plan bien articulé mais mal financé
Le Plan MND identifie douze enjeux majeurs autour de quatre axes stratégiques :
Axe 1 : Soigner et accompagner tout au long de la vie et sur l’ensemble du territoire :
– Favoriser un diagnostic de qualité et éviter les situations d’errance.
– Favoriser une évaluation globale et partagée de la situation et garantir l’accès à un programme personnalisé de soins.
– Donner l’accès à des soins de qualité tout au long de la vie avec la maladie.
– Adapter la formation des professionnels pour améliorer la qualité de la réponse apportée aux personnes malades.
Axe 2 : Favoriser l’adaptation de la société aux enjeux des maladies neurodégénératives et atténuer leurs conséquences personnelles et sociales sur la vie quotidienne :
– Faciliter la vie avec la maladie au sein d’une société respectueuse, intégrative et volontaire dans son adaptation.
– Favoriser le lien social, les liens de proximité et lutter contre l’isolement.
– Soutenir les proches aidants dont font partie les aidants familiaux.
– Atténuer les conséquences économiques de la maladie et aider au maintien d’un parcours professionnel pour les malades jeunes.
– Faire des droits de la personne et de la réflexion éthique un levier de conduite du changement.
Axe 3 : Développer et coordonner la recherche sur les maladies neurodégénératives :
– Dynamiser et mieux coordonner la recherche sur les MND.
– Mieux comprendre els MND pour prévenir leur apparition et ralentir leur évolution.
Axe 4 : Faire de la gouvernance du PMND un véritable outil d’innovation, de pilotage des politiques publiques et de démocratie en santé :
– Rendre effective la démocratie sanitaire et structurer la gouvernance dans le cadre de la mise en œuvre du PNMD.
Un programme séduisant mais qui pâtit d’une carence de taille : aucune précision n’est en effet fournie sur son financement, ce qui fait dire à Marie-Odile Desana, Présidente de France Alzheimer, que « le financement doit être à la hauteur. (…) Or, on a des inquiétudes puisque nulle part on n’a trouvé référence, dans les projets de loi en train d’être votés, d’un financement lié à ce Plan. »