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Alzheimer Prise en charge

© Clic des Moulins de Flandres

Quand les accueils de jour vont au-devant des malades et de leur famille

Solution de maintien à domicile pour les personnes atteintes de la maladie d’Alzheimer et de répit pour leurs proches, les accueils de jour itinérants se développent dans les zones rurales depuis le plan Alzheimer 2008-2012. Issus de synergies locales fortes, ils ne s’affranchissent cependant pas encore du cadre expérimental.

 

« Dans leur tête, les gens ne viennent pas à l’accueil de jour : ils viennent « au club », passer un bon moment », constate Rosalie Degroote, ergothérapeute de l’accueil de jour itinérant de l’Apapad (Association pour la promotion d’actions pour les personnes âgées ou dépendantes), en Flandres. Pour résumer, un accueil de jour ne jouit pas de locaux ni d’adresse fixes. Il s’agit en effet d’un dispositif qui est hébergé par des Ehpad ou dans des salles municipales ou associatives. Il concerne l’accueil de malades atteint d’Alzheimer par une équipe mobile dont les postes sont fixes mais pas forcément les membres. Cette équipe tourne sur plusieurs lieux d’accueil et s’y installe à la journée, ouvrant ses portes aux malades des environs. Les activités proposées sont similaires à celles des accueils de jour fixes. Seule différence : la nécessité d’adapter certaines d’entre elles. « Nous ne voyons les personnes qu’une fois par semaine. Il nous est donc difficile de mener des projets sur le long terme avec elles. Nous emmenons donc nos activités manuelles de place en place et chacun y participe à sa façon », explique Rosalie Degroote.

L’impulsion forte du milieu associatif

Dans le Perche, c’est l’Una, association d’aide à domicile, qui a mis sur pied l’accueil de jour itinérant depuis 2009, suite aux remontées de ses salariés qui constataient l’épuisement des aidants. En Haute-Savoie, c’est France-Alzheimer qui a soutenu l’initiative, créé deux dispositifs et s’apprête à en ouvrir deux autres. Dans les Flandres, comme en Côte-d’Or, la formule est issue d’un groupe de travail d’aide aux aidants. « Nous avons constaté que les gens devaient souvent faire 30 kilomètres pour atteindre le premier accueil », explique Céline Asseman, infirmière coordinatrice de l’Apapad. Or, un tel effort est souvent rédhibitoire en zone rurale, comme le confirme Amélie Barraud, neuropsychologue responsable de la structure dans le Perche ornais : « Nous offrons le transport aux usagers de l’accueil de jour dans un rayon de 15 kilomètres. Nous avions tablé sur une demande de l’ordre de 50 % des inscrits mais les besoins sont plus proches des 100 % ! »

Depuis 2006, les directeurs d’Ehpad membres du Clic (Centre local d’information et de coordination) des Moulins des Flandres, conscients qu’ils ne pouvaient pas tous ouvrir un accueil de jour, ont décidé de mettre leurs locaux à disposition quelques jours par semaine. « Petit à petit, nous nous sommes orientés vers une équipe mobile accueillie dans les locaux des Ehpad volontaires », explique Céline Asseman. Ce principe d’équipe mobile se décline aussi dans le Perche, en Côte-d’Or et en Haute-Savoie même si sa composition peut varier et inclure une infirmière, une Aide médico-psychologique (AMP), une ergothérapeute, des bénévoles… Si quatre places sont disponibles dans l’accueil de jour nordiste, qui doit faire face à une liste d’attente de quinze personnes, ses homologues en offrent plus souvent de six à huit. « Je mène les entretiens pour la constitution du dossier tandis que les médecins des Ehpad assurent une consultation de pré-admission. Notre équipe comporte un chauffeur-accompagnateur qui va chercher les malades au domicile et les y ramène, une ergothérapeute et une Aide médico-psychologique (AMP). Les familles reçoivent le planning mensuel des activités et peuvent solliciter les conseils de notre ergothérapeute », résume Céline Asseman.

Un sas avant l’entrée en institution ?

« Nous sommes accueillis dans les locaux d’Ehpad proches des malades. L’accueil de jour constitue un relais, une entrée en attendant la maison de retraite », constate Rosalie Degroote. Pas forcément rétorque en somme l’association France-Alzheimer Savoie qui, elle, ne fait pas appel aux Ehpad. En effet, ses deux accueils de jour bénéficient l’un, d’une salle polyvalente municipale, l’autre, d’une salle de loisirs de la communauté de communes adaptée à l’accueil des personnes âgées. « Nous connaissons la difficulté qu’éprouvent les familles à se rendre dans des locaux qui ressemblent à des maisons de retraite. Nous tentons donc de convaincre les collectivités locales de s’impliquer pour développer des lieux d’accueil neutres. Nous avons écrit à tous les élus locaux pour leur expliquer que s’ils mettent des locaux adaptés à disposition, nous fournirons les équipes compétentes », explique Arlette Meyrieux de France Alzheimer. Concernant ses deux prochains projets, l’association discute de l’aménagement des locaux avec les Mairies : « À Modane, la Municipalité nous a soumis les plans d’un appartement thérapeutique de trois ou quatre pièces et à Montmélian, c’est l’ancien appartement de fonction d’un instituteur qui pourrait accueillir les malades, en lien avec les enfants. »

L’intérêt des institutions

La formule d’accueil de jour intéresse également plusieurs Agences régionales de santé (ARS). « En 2008, la DRASS (Direction régionale des Affaires sanitaires et sociales) de l’époque a fait le point sur les accueils de jour et a accueilli favorablement notre idée d’un accueil itinérant. Il a été mis en place en 2010 sous l’égide de l’ARS », retrace Pierre-Henri Daure, directeur de la Fedosad (Fédération dijonnaise des œuvres de soutien à domicile) en Côte-d’Or. L’ARS avait orienté l’association sur le nord du département « mais il était déjà bien maillé. Au bout de deux mois, nous nous sommes installés à l’est et au sud. Trois Ehpad nous prêtent des locaux annexes et une communauté de communes met à notre disposition l’espace jeune et un bus adapté », précise le directeur. Reste que les démarches, même évaluées, ne sortent pas d’un cadre expérimental. En place depuis 2009, l’expérimentation de l’Apapad a été l’objet d’une évaluation en 2012 et est reconduite pour cinq ans. « Le dispositif est fragile car il ne tient que par la motivation des acteurs. Il faudrait le pérenniser. Qui plus est, nous aurions aimé doubler le nombre de places pour mieux répondre à la demande », s’inquiète Céline Asseman.

Stéphanie Marseille

 

Témoignage

Jean-Paul Dammarez, directeur de l’Ehpad Olivier Varlet à Bourbourg (59)

« En 2006, avec les directeurs d’Ehpad et l’Apapad, nous avons créé un groupe d’aide aux aidants pour trouver comment accompagner au mieux les conjoints de personnes atteintes par la maladie d’Alzheimer et dont la volonté est de rester à domicile. À cette occasion, nous nous sommes aperçus qu’en zone rurale, il n’est pas possible de remplir un accueil de jour fixe tous les jours. Mieux vaut donc rendre service à de nombreux malades sur plusieurs sites différents quelques jours par semaine. Nous souhaitons également mutualiser les compétences et ce, d’autant que tous les établissements n’ont pas la capacité de créer un tel accueil de jour.

Grâce à cet accueil de jour itinérant, nous inscrivons nos Ehpad dans une politique gériatrique globale. Cette formule renforce notre habitude d’être ouverts sur l’extérieur, sur la vie de la commune et cela crée des synergies entre les professionnels : nous profitons par exemple des compétences de l’ergothérapeute qui, elle, bénéficie des conseils de nos animatrices. De leur côté, les malades de l’accueil de jour itinérant profitent de notre jardin thérapeutique et de l’espace Snoezelen. Ils sont plus jeunes que nos résidents et cela crée une émulation entre eux.

Cette démarche nous donne le sentiment d’accomplir modestement une mission d’intérêt général sur le territoire. Je suis un directeur d’Ehpad heureux car je suis en mesure de placer le potentiel de mon établissement à la disposition d’encore plus de personnes âgées que les résidents d’Olivier Varlet. »

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