L’Ehpad joue parfois un rôle de médiateur
Responsable de projet au sein du secteur Personnes âgées à l’Agence nationale de l’évaluation et de la qualité des établissements et services sociaux et médico-sociaux (Anesm), Marie-Pierre Hervy détaille le modus operandi d’une bonne relation entre les familles et l’établissement.
Quelles sont les recommandations de l’Anesm concernant la politique relationnelle à adopter auprès des familles en Ehpad ?
Marie-Pierre Hervy : Les quatre recommandations faites sur la qualité de vie en Ehpad abordent à chaque fois la famille. Celles-ci concernent notamment l’accueil et la préparation à l’établissement, les informations données avant l’entrée en établissement ou encore les négociations et les discussions sur les demandes des familles. Par rapport à cela, l’Ehpad joue parfois un rôle de médiateur, les demandes de la famille et du résident n’étant pas automatiquement les mêmes. C’est pourquoi nous recommandons aux professionnels de s’appuyer sur les proches pour recueillir leurs points de vue sur les besoins et les attentes de leur parent dans le cadre de l’élaboration de son projet personnalisé. Les professionnels doivent avoir conscience que c’est la famille qui connaît le mieux la personne. Attention, toutefois, à ce que cela ne masque pas pour autant la parole du résident.
En terme de management, comment impliquer l’équipe de l’Ehpad dans la relation avec les familles ?
M-P. H. : Il y a un premier travail à faire et qui est loin d’être fait : les familles doivent pouvoir identifier clairement qui est qui et qui fait quoi. Peu importe la forme que cela prend mais un trombinoscope est par exemple un moyen de réponse. Lorsque celui-ci fonctionne bien, la famille de Madame Dupont sait que telle personne a telle fonction et qu’elle est présente tel jour si elle souhaite la contacter ou la rencontrer. De même, les livrets d’accueil doivent-ils être correctement renseignés. Ils concernent les fonctions de l’encadrement, les questions auxquelles l’équipe peut répondre, les personnes désignées pour cela, les contacts pour les joindre…
Tout cela doit évidemment être déterminé préalablement par l’équipe de direction. Un exemple : concernant les diagnostics médicaux, le médecin coordonnateur est évidemment le mieux placé pour informer les proches. Mais cela ne veut pas dire que toutes les informations de santé ne peuvent pas être discutées avec l’infirmière coordonnatrice, laquelle est, comme chacun sait, bien plus présente dans l’établissement.
Nous recommandons également de mettre en place un référent auprès des résidents. Enfin, les professionnels doivent s’impliquer dans le Conseil de la vie sociale auquel il est parfois utile d’inviter d’autres personnels que ceux déterminés dans le décret, par exemple le cuisinier lorsqu’on aborde la question des repas ou la ménagère s’il y a un problème avec le linge. C’est aussi cela faciliter l’échange et les relations.
Certains Ehpad ont des blogs via lesquels ils tiennent informées les familles des activités de leurs résidents. Que pensez-vous de ce genre d’initiative ?
M-P. H. : À l’heure d’Internet, c’est effectivement une évolution qu’il faut prendre en compte mais il ne faut surtout pas oublier les personnes concernées. Monsieur Dupont peut ne pas avoir envie qu’une caméra soit braquée sur lui et que sa fille sache en permanence ce qu’il fait. Il faut faire très attention car même si cela peut créer et faciliter un lien, ce type de site doit préalablement être discuté individuellement en recueillant à chaque fois l’avis de la personne impliquée.
Mais comment faire face à des résidents atteints de troubles cognitifs ?
M-P. H. : Ce n’est pas blanc ou noir. En Ehpad, la majorité des personnes qui présentent des troubles cognitifs sont quand même accessibles à la relation et à l’information, laquelle doit bien sûr être adaptée. Ensuite, on peut faire des tentatives pour observer comment les gens réagissent et réévaluer la situation. Même pour les personnes ayant perdu l’usage de la parole, on peut observer un comportement curieux et se poser la question de savoir si cela peut être dû à une angoisse possiblement générée par la relation avec leur(s) enfant(s) ou bien par l’angoisse de ces derniers.
Y a-t-il alors une relation différente à entretenir avec les familles des résidents vivant en unité protégée ?
M-P. H. : Il faut encore davantage insister sur les raisons pour laquelle la personne est placée en unité et quels sont les objectifs de l’accompagnement spécifique en unité pour la personne. Comme cela veut souvent dire que la personne concernée a des troubles du comportement, il faut effectivement augmenter l’accompagnement des aidants, si besoin avec le soutien du psychologue, car ces troubles génèrent souvent beaucoup de souffrance pour la famille.
Les principales recommandations de l’Anesm en faveur des familles> Les informer de leurs droits et s’assurer de la bonne compréhension de ces informations ; préciser la place de la personne âgée et celle des proches (notamment dans l’accompagnement de leur parent et dans la vie institutionnelle) ; leur faire connaître l’équipe, les rôles et les coordonnées de chacun. Ces recommandations sont consultables sur Internet : www.anesm.sante.gouv.fr/spip.php?page=rubrique&id_rubrique=10 |