Les défis de la valorisation des déchets
Les lois Grenelle 1 et 2 imposent un échéancier aux établissements sanitaires et médico-sociaux pour réduire, trier et valoriser les déchets issus des cuisines. Une tâche complexe.
En 2012, les producteurs importants de biodéchets, au nombre desquels figurent les cuisines des établissements hospitaliers et des Ehpad de grande taille (1 400 lits), se doivent de ramener leur volume de déchets organiques à 120 tonnes par an. À terme, l’objectif fixé par les lois Grenelle 1 & 2 vise les 10 tonnes annuelles en 2016 et inclura les Ehpad de moindre capacité (115 lits). La même année, les établissements devront d’ailleurs avoir réduit leur production d’huile alimentaire usagée de 1 500 litres par an à 60.
Le Grenelle de l’environnement impose l’amélioration du taux de recyclage matière et organique, lequel doit atteindre 75 % dès 2012 pour les déchets des entreprises et les emballages. La réglementation commande en outre, pour les valoriser, de trier ces ordures sur site ou grâce à un prestataire. Un défi complexe car ces déchets alimentaires n’étaient pas forcément distingués du tout-venant. La démarche en appelle surtout au bon sens. La première étape consiste en effet à évaluer la quantité de déchets produits. À cet égard, la circulaire de janvier 2012 établit un seuil de 134 g de déchets par repas quand ce dernier est fabriqué et servi sur place. Pour se situer par rapport à ce seuil, rien de tel qu’une campagne de pesée telle que l’a menée Sylvaine Bouquerel, ingénieur-maître en restauration et consultante, dans un centre de soins de suite de l’Hérault en vue la rédaction de l’ouvrage collectif de FCSI (Foodservice consultants society international) : « Le poids des déchets variait, sur une semaine, entre 134 g et 173 g. Ce surplus était dû à du melon pas mûr, rejeté par les patients. » De telles mesures fournissent des indicateurs précieux (cf. interview ci-jointe) qui peuvent orienter les achats : « Il faut savoir qu’un melon servi sur place produit 65 g de déchets en pépins et 40 g en peau. Une cuisse de poulet entraînera 85 g de déchets en os et il faut se rappeler que les purées et les préparations mixées font partie des déchets lourds », rappelle la consultante.
Que choisir : la valorisation solidaire ou technique ?
Ingénieur en restauration au CHU du Mans et président de l’UDIHR (Union des ingénieurs hospitaliers en restauration), Didier Girard a mis en place une valorisation originale : « Nous avons conclu une convention avec la Ligue de défense des animaux (LDA) qui s’occupe de bêtes en fin de vie pour quelle récupère nos restes alimentaires. Une fois par semaine, elle leur donne donc à manger une pâtée maison. » De la même manière, le pain en surplus est récupéré par une autre association qui le fait griller pour le distribuer au bétail. Didier Girard s’est également lancé dans une entreprise délicate : le don des reliquats alimentaires – ces produits destinés à la préparation des plateaux-repas non utilisés à cause des aléas des entrées et sorties quotidiennes à l’hôpital – à une association caritative qui fournit des repas à des personnes en difficulté. Quant aux solutions techniques de valorisation des déchets, elles se déclinent en trois grandes variantes : le compost, la méthanisation et la déshydratation. Certains dispositifs peuvent être installés sur site : bacs de lombricompostage (déchets organiques + lombrics), différents pavillons et bacs de compostage (déchets organiques + sciure ou déchets verts), digesteur enzymatique (déchets organiques + enzymes), déshydrateur (déchets organiques + chaleur). Mais l’idéal reste la mutualisation de la collecte et du traitement des déchets entre plusieurs établissements par compostage ou méthanisation (eaux usées + boue + déchets organiques). Et avant de choisir, il est préférable de s’informer auprès des collectivités des aides et des synergies locales existantes.