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Le Carnet de liaison collaboratif ou comment promouvoir le dialogue interprofessionnel Non classé

CLC

CLCLes infirmiers libéraux bretons sont à l’origine du projet de Carnet de liaison collaboratif (CLC) qu’ils ont développé sous l’égide de l’ARS dans le cadre de l’appel à projets « Territoire de soins numérique » lancé par Matignon en fin d’année dernière. Un outil destiné aussi à être utilisé par les Ehpad et qui illustre parfaitement la recherche d’outils de dialogue entre les différent acteurs de la prise en charge des patients souffrant de maladies chroniques.

 

En début d’année, l’ARS (Agence régionale de santé) de Bretagne a souhaité répondre à l’appel à projets « Territoire de soins numérique » lancé par Matignon. Le jeu en vaut la chandelle puisque la dotation globale s’élève à 80 millions d’euros à répartir entre les cinq projets qui seront sélectionnés fin mai. L’ARS n’avait aucune idée préconçue et a donc laissé libre court aux initiatives des acteurs qu’elle a conviés le 14 janvier pour qu’ils fassent part de leurs bonnes idées. Celles-ci n’abondant pas, Daniel Guillerm, infirmier libéral et Président de l’instance représentative de sa profession dans la région1, s’est engouffré dans la brèche. En s’appuyant sur un comité de pilotage inter-URPS et sur des industriels de la région tels qu’Alyacom, il a développé l’idée de mettre en place un Carnet de liaison collaboratif (CLC) à l’intention des patients atteints de maladies chroniques.

 

« L’objectif est de s’inscrire dans la Stratégie nationale de santé (SNS), c’est-à-dire de prendre en compte les patients qui ne sont pas dans des phases aigües et de coordonner leur parcours sur une plate-forme collaborative dématérialisée,explique Daniel Guillerm. L’un des enjeux de la SNS est en effet le parcours de soins dont l’un des outils qui sera mis à disposition des professionnels de santé sera le Plan personnalisé de soins (PPS) en ville [déjà testé dans le cadre des parcours de soins des Personnes âgées en risque de perte d’autonomie (Paerpa), N.D.L.R.] ou le contrat de coordination en Ehpad. Des dispositifs qui ne sont à ce jour pas dématérialisés. En Ehpad, il s’agit d’un document papier qui transite de professionnel en professionnel qui ont autre chose à faire que de jouer les postiers. Il n’en demeure pas moins que le transfert d’informations est la pierre angulaire de la coordination des soins. »

 

Un outil d’anticipation et de prévention des crises

En clair, le CLC a vocation à optimiser le parcours de soins en étant à la fois le préalable et le support du PPS et en faisant en sorte qu’il ne devienne pas une usine à gaz. Toutefois, le CLC peut être créé et perdurer même en l’absence de PPS. Il comporte une grille de six risques majeurs identifiés (dénutrition, chute, iatrogénie médicamenteuse, troubles cognitifs, isolement psychosocial et plaies chroniques) qui, s’ils n’ont pas été préalablement évalués et anticipés, sont susceptibles de déboucher sur des hospitalisations, en particulier aux urgences.

Même s’il est à l’origine destiné aux libéraux de santé intervenant au domicile, le CLC est, selon Daniel Guillerm, « un outil qui peut être avantageusement utilisé en Ehpad, l’idée étant à chaque fois de décloisonner les acteurs de la prise en charge, internes ou externes à l’établissement ». Avec un point fort : « En établissement comme en ville, les infirmiers auront un rôle pivot et un rôle d’alerte dans le cadre du CLC puisque le but est de prévenir les risques en agissant en amont d’une éventuelle crise. » Cet outil permet donc de redonner une place centrale aux soignants les plus en contact avec les patients. Ils devront remplir le CLC (observations, actes effectués…) au même titre que les autres professionnels de santé intervenant auprès du patient. Ils pourront surtout alerter le médecin traitant ainsi que le médecin coordinateur en cas de dégradation imminente ou avérée pouvant déboucher sur la survenance d’une phase aigüe. Si une hospitalisation est malgré tout inévitable, les liens entre l’équipe soignante de l’Ehpad et celle de l’établissement hospitalier seront facilités. Cette dernière devra à son tour renseigner et compléter le CLC pour le tenir à jour et favoriser ainsi le retour de la personne âgée dans l’établissement.

 

Favoriser la coordination et donc la réactivité des professionnels

Éviter les demandes de soins et les consultations redondantes, harmoniser les interventions, réaliser une économie de temps et d’argent, en somme, proposer le bon soin au bon moment par la bonne personne sans que le résident ait à subir des démarches lourdes, tel est le leitmotiv des promoteurs du CLC. Lequel favorise à la fois la coordination et donc la réactivité des professionnels qu’ils soient du secteur sanitaire, médico-social ou social.

Daniel Guillerm saura donc fin mai si les pouvoirs publics retiennent le Carnet de liaison collaboratif parmi les initiatives qui seront financées au titre de « Territoire de soins numérique ». Si c’est le cas, le dispositif commencera à être déployé dès la rentrée prochaine. Dans le cas contraire, le concept, dont la pertinence semble faire l’unanimité, ne restera a priori pas lettre morte et devrait se concrétiser mais de manière moins ambitieuse. Cependant, une chose est certaine : il pourrait être l’une des réponses à l’attente et à la recherche d’outils permettant des échanges rapides entre professionnels prenant en charge les patients, en particulier âgés ou/et souffrant de pathologies chroniques.    

Alexandre Terrini

 

 


 CLC, mode d’emploi

Le Carnet de liaison collaboratif (CLC) est un outil virtuel qui doit faciliter le travail des professionnels de santé intervenant auprès des patients atteints de maladies chroniques.

Les promoteurs du CLC le présentent comme un complément du Dossier médical personnel (DMP). Mais à la différence de ce dernier, il sera accessible à tous les professionnels concernés, en particulier les auxiliaires de vie. Ils s’y connecteront avec leur Carte de professionnel de santé ou via un code sécurisé qui leur sera attribué. Le patient pourra  évidemment le consulter puisque l’établissement d’un CLC sera soumis à son aval préalable. Par ailleurs, la personne de confiance qu’il a désignée lors de son admission au sein de l’Ehpad pourra être rapidement avertie en cas de problème.

L’un des atouts du CLC est d’être une application facilement utilisable en tout lieu à partir d’une tablette numérique, d’un Smartphone ou encore d’un ordinateur portable. Le modus operandi en Ehpad serait donc l’utilisation d’une tablette dans les chambres puis le transfert des données sur l’unité centrale et le serveur de l’établissement. Outre les informations figurant la Carte vitale du patient, le contenu du CLC comportera des données relatives à six grands risques affectant généralement les patients atteints de maladies chroniques. Chaque soignant y consignera les actes qu’il effectuera en lien avec ces pathologies mais aussi ses observations et les événements inhérents à l’évolution de l’état de santé du résident. Il pourra également déclencher une alerte à l’intention de ses collèges en cas de dépistage opportuniste d’une situation aigüe imminente. Tous ces éléments seront donc partagés, ce qui garantira la communication entre les intervenants (internes et externes) et l’efficacité de la prise en charge.   


 

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