«Connaître les rouages administratifs est un atout.» |
Marc Nicolau dirige La Loge de mer, à Canet-en-Roussillon (66), qui a acquis sous son égide le statut d’Ehpad. Une mutation qu’il a conduite et qui est venue étoffer un parcours professionnel pour le moins original.
Tout a commencé par une vocation contrariée : « J’ai toujours voulu travailler dans l’hôtellerie mais j’ai dû y renoncer à cause d’un problème de santé, raconte Marc Nicolau. Cela ne m’a pas empêché de passer un bac G3 techniques commerciales puis un DUT de gestion et une maîtrise d’ingénierie d’hôtellerie et de tourisme. » Mais, nécessité faisant loi, il a bien fallu se résoudre à entrer dans la vie active par des voies de traverse. En l’occurrence, à la clinique des Platanes à Perpignan où officiait son père médecin. Un pied à l’étrier loin d’être un passe-droit et un régime de faveur. Le fils commença en effet tout en bas de l’échelle, au standard, à l’accueil. Puis, au fil des mois, son champ de compétences s’étoffa jusqu’à devenir attaché de direction avec des attributions diverses et variées : gestion du personnel, facturation, relations avec les médecins, dossiers impliquant la Cram etc. Autant d’acquis peaufinés et validés par l’obtention, en 1995, d’un DESS économie et gestion hospitalière privée.
« Savoir ce que les tutelles veulent dans ce genre de situation »
Suffisant pour être intronisé en 2002, dans le cadre d’un CDD d’un an, directeur administratif de deux cliniques de Soins de suite et de réadaptation à Amélie-les-Bains, toujours dans les Pyrénées-Orientales. Ponctuelle, la mission était néanmoins cruciale : réorganiser ces deux établissements dans le cadre d’un passage du tarif partiel au tarif global avec, notamment, l’embauche de personnels de soins. « J’ai véritablement découvert l’exercice des responsabilités », résume Marc Nicolau qui se retrouva cependant, comme prévu, sur le marché de l’emploi. Début 2003, une petite annonce décida de son avenir : un poste de directeur d’un foyer-logements baptisé La Loge de mer, à Canet-en-Roussillon, et géré, sous la houlette du Centre communal d’action sociale (CCAS), par une association de type loi de 1901 délégataire de service public, était à pourvoir dans la perspective de médicaliser la structure. 70 candidats au départ et un seul élu à l’arrivée, Marc Nicolau, dont l’expérience du secteur sanitaire fut un atout précieux pour emporter le choix des recruteurs.
Il faut dire que tout était à faire et d’abord, monter le dossier juridique servant de base à la transformation du foyer-logements en Ehpad mais aussi préparer la rédaction de la future convention tripartie. « Dans ces cas-là, on apprend vite, confirme Marc Nicolau. J’avais comme atout de connaître les rouages administratifs et de savoir ce que les tutelles veulent dans ce genre de situation. Cela ne m’a pas empêché d’aller demander des conseils à des collègues directeurs d’Ehpad qui étaient passés par là car le secteur médico-social était quand même une nouveauté pour moi. »
Financer certains postes via un déficit budgétaire maîtrisé
Les négociations avec les tutelles, justement, ont débuté en septembre 2004 avant de se solder par la délivrance d’une autorisation en décembre 2005. Durant cette période, il a fallu faire comme si, autrement dit, concevoir la future structure et effectuer les pré-recrutements nécessaires en espérant une réponse positive qui est finalement arrivée. Un travail à vide synonyme de tout ou rien au fil des mois. Marc Nicolau, lui, a dû batailler ferme pour atteindre a minima l’objectif fixé : « Nous avons été contraints d’utiliser les locaux tels qu’ils étaient et de les adapter. Le CCAS est devenu propriétaire du bâtiment en 2005 et, à l’époque, la Mairie avait comme projet de construire un établissement à l’horizon 2010. Finalement, il a été reporté pour des raisons financières et normalement, un nouvel ensemble devrait voir le jour en 2018. » En attendant, il a fallu gérer les urgences et mettre aux normes les structures. Pour obtenir le renouvèlement de la convention tripartite, la Municipalité a ainsi financé l’installation d’escaliers de secours et d’évacuation en cas d’incendie. Reste à présent à aménager les salles de bain et à supprimer les bacs de douche surélevés par rapport au sol. Autant de travaux qui ont un coût important.
À ce jour, La Loge de mer compte 19 aides-soignantes en Équivalent temps plein (ETP) mais il n’en a pas toujours été ainsi. Marc Nicolau a été obligé de faire le forcing des années durant pour avoir le personnel que nécessite la présence de 84 résidents, quitte à financer certains postes via un déficit budgétaire maîtrisé. Moralité : « Même si, au quotidien, mon travail est passionnant, le temps administratif et le temps de gestion ne sont pas les mêmes, ce qui complique souvent les choses. » Ses confrères ne diront pas autre chose.
Alexandre Terrini
Une humanité qui fait la différenceLa Loge de mer1 compte 80 % de personnes atteintes de la maladie d’Alzheimer ou de pathologies apparentées. La configuration actuelle de l’établissement ne permet pas encore de leur affecter un lieu dédié, si bien que tous les résidents vivent ensemble, ce qui n’est pas toujours simple à gérer, surtout lorsqu’il s’agit de proposer des activités susceptibles de concerner tout le monde. « On fait avec les moyens du bord », reconnaît Marc Nicolau qui a signé une convention avec l’hôpital psychiatrique de Thuir afin de suivre le traitement des résidents et de le modifier le cas échéant. Le futur Ehpad, qui devrait sortir de terre en 2018, sera donc une aubaine puisqu’il comportera notamment un Pasa ainsi qu’un accueil de jour. La force de La Loge de mer réside surtout dans la dimension humaine et la qualité de l’accueil. « Lors de décès, les familles viennent très souvent nous remercier pour la manière dont nous avons accompagné leur proche. C’est très gratifiant », affirme Marc Nicolau. Par ailleurs sur 84 pensionnaires, en grande majorité des femmes veuves originaires des Pyrénées-Orientales, 60 ne paient pas l’impôt sur le revenu. Il n’empêche, le Conseil général a refusé d’habiliter l’établissement à l’aide sociale, considérant que le tarif journalier d’hébergement (63,96 euros) était trop élevé… 1 3 avenue Port-Roussillon, Résidence La Loge de mer, 66140 Canet-en-Roussillon |