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Les évaluations internes et externes, de véritables outils de management Dossiers

 

Les Ehpad sont dans la dernière ligne droite puisqu’ils doivent remettre les résultats de leur évaluation interne à l’Agence régionale de santé (ARS) et au Conseil général dont ils dépendent avant le 3 janvier 2014, et ceux de leur rapport d’évaluation externe d’ici le 3 janvier 2015. Un timing serré mais qui laisse encore la possibilité aux équipes de direction de piloter une réflexion pertinente et pointue sur tous les champs d’activité de leur établissement : l’accompagnement, le soin, l’accueil, l’animation…

Dossier réalisé par Nathalie Ratel

 

L’heure n’est plus à la réflexion mais à l’action. Les dates butoirs de remise des rapports d’évaluation interne comme externe approchent et, « maintenant, il faut y aller », rappelle Florence Arnaiz-Maumé, déléguée générale du Synerpa. De quoi s’agit-il ? D’examiner les pratiques et les modes de fonctionnement mis en place au sein de chaque établissement afin d’établir une sorte de photographie dynamique de la structure à un instant T. Bref, de faire le bilan de ses points forts et de ses points faibles, complété d’un plan et d’un calendrier des améliorations envisagées afin d’améliorer la qualité.

Le tout en deux étapes : l’évaluation interne, qui est une autoévaluation réalisée par les établissements eux-mêmes, suivie d’une évaluation externe effectuée par un organisme évaluateur agréé par l’Agence nationale de l’évaluation et de la qualité des établissements et services sociaux et médico-sociaux (Anesm).

« Ces évaluations, en particulier internes, impliquent une véritable mobilisation des équipes puisqu’il s’agit d’engager une réflexion sur le cœur des métiers en Ehpad et sur le mode de prise en charge des résidents. Celle-ci passe prioritairement par une mobilisation forte du management », notamment du directeur de l’établissement, voire, dans les plus grandes structures, du directeur de groupe, du directeur régional et du responsable qualité régional, assure le Dr François Bertin-Hugault, directeur éthique, médical et qualité du groupe Korian.

Planification et pilotage

Le directeur s’assure de la cohérence entre les projets d’amélioration issus des évaluations et le projet d’établissement mais il est aussi celui qui impulse une dynamique. « Il met en lien tous les acteurs intervenant au sein de l’établissement à tous les niveaux y compris, donc, la lingère, l’agent de service ou encore l’agent de service hôtelier en cuisine, détaille Isabelle Zanolla, directrice d’un Ehpad situé dans l’est lyonnais. Il relance une dynamique. Il fixe un cap et donne ainsi du sens à une action quotidienne. » Il guide et encadre ses collaborateurs, il répartit les tâches pour que chacun progresse dans son domaine. Il programme des points d’étape afin de faire des bilans réguliers. Il « aide à la prise de conscience des points faibles tout en montrant d’emblée les recours possibles » pour ne pas démoraliser le personnel, précise Sylvie Platon, représentante de l’AD-PA au sein du comité d’orientation stratégique de l’Anesm et déléguée régionale de la FHF pour le secteur médico-social.

En outre, partager les efforts que représente l’élaboration des objectifs puis la mesure régulière de la progression pour les atteindre est un processus continuel susceptible de fédérer les équipes, rappelle-t-elle, tout en insistant sur le fait que « le directeur conduit les professionnels à atteindre ces objectifs puis à les dépasser parce qu’il ne s’agit pas de se fixer un but immuable mais bien d’avancer encore et toujours ». En outre, dans ce qu’elle qualifie de « marche en avant », il existe une « notion de progressivité » et de « rythme » dont le « directeur doit s’emparer » pour l’adapter aux équipes professionnelles sans les épuiser ni les écarter.

Communication

Les évaluations permettent d’éclairer chaque professionnel à condition que la communication soit optimisée, ajoute Sylvie Platon.

« Le directeur a, dans ce domaine, un rôle-clé à jouer : il doit répéter le message plusieurs fois et de manière différente à chaque fois pour bien se faire comprendre du plus grand nombre. Le but étant d’utiliser chaque maillon de la chaîne professionnelle pour renforcer la dynamique comme une corde à laquelle on peut s’accrocher lorsque le chemin monte un peu trop. » Il doit également, selon elle, contribuer à l’amélioration de l’image du secteur médico-social en communiquant sur la démarche lors de réunions avec les familles, de journées portes-ouvertes voire d’interviews dans la presse pour démontrer que les acteurs du secteur travaillent sur eux-mêmes afin de s’améliorer.

Le directeur ne porte pas non plus toute la démarche évaluative sur ses épaules. Il opère avec le soutien et l’expertise du médecin coordonnateur, de l’infirmière coordonnatrice, du responsable de l’hébergement mais aussi du psychologue, de l’ergothérapeute, du psychomotricien etc. En somme, les évaluations sont avant tout un travail d’équipe !

 

Où en sont les Ehpad ?

Selon les résultats d’une enquête sur la mise en œuvre de l’évaluation interne dans les Établissements et services sociaux et médico-sociaux (ESSMS) publiée en février 2013 par l’Anesm, « 60 %  des  Ehpad  sont  entrés  dans  la  démarche  d’évaluation interne » et, indépendamment de leur statut public ou privé, ceux « autorisés pour plus de 50 places sont davantage engagés dans la démarche. » Dans le détail, l’étude révèle que seuls 20 % des rapports d’évaluation interne sont rédigés. Tous n’ont pas encore été remis aux autorités de tutelle. Ainsi, à ce jour, selon l’ARS de Bourgogne, seuls 13 rapports d’évaluation interne et 7 rapports d’évaluations externes ont été remis, ce qui, au regard du nombre d’Ehpad dans la région (279 au total), est très peu. En Bretagne, l’ARS a reçu 88 évaluations internes et 15 évaluations externes, sachant que la région abrite 421 Ehpad. Certes, les Ehpad ont encore dix mois devant eux pour remettre leur rapport avant la date butoir. Cette situation inquiète toutefois les fédérations d’établissement, qui craignent une saturation des demandes d’évaluation externe dans les derniers mois susceptible d’entraîner une pénurie d’évaluateurs externes et, éventuellement, une flambée du prix de leurs prestations.

 


 

Évaluer, c’est améliorer

L es évaluations internes et externes ont été instituées par la loi n°2002-2 du 2 janvier 2002 rénovant l’action sociale et médico-sociale. Elles s’appliquent aux 33 000 Etablissements et services sociaux et médico-sociaux (ESSMS), dont les Ehpad, et visent à examiner la qualité de l’activité et des prestations de chacune de ces structures. Pour Benoît Heurtault, consultant au sein du cabinet de conseil KPMG, « l’évaluation interne comme externe est un très bon outil en faveur de la qualité. Les directeurs d’établissements qui, au-delà de leurs obligations légales et réglementaires, se serviront de ces évaluations pour initier ou dynamiser une démarche qualité en tireront des enseignements riches et des bénéfices. » En effet, la circulaire du 21 octobre 2011, qui vient préciser les modalités de la loi 2002-2, prévoit « un dialogue interne entre les acteurs des différents niveaux de responsabilité ». Or, ces réunions interprofessionnelles, d’ordinaire difficiles à organiser, constituent, selon Benoît Heurtault, de véritables « temps forts » permettant de réfléchir à tous les aspects de la prise en charge des résidents : le projet de vie, la qualité des soins et de l’hébergement, l’animation, la place accordée à la famille… « Même sans rédiger de plan d’action, une heure de discussion autour de thèmes donnés permet aux professionnels de se mettre d’accord sur un certain nombre de pratiques nouvelles qu’il est immédiatement possible de mettre en place au profit de la qualité », précise-t-il tout en indiquant « qu’évaluer, c’est déjà améliorer ».

Il est encore trop tôt pour savoir quel sera l’impact réel de ces évaluations sur la qualité au sein des Ehpad. « Elles apporteront un véritable plus dans l’engagement que les établissements portent depuis longtemps déjà vis-à-vis de la qualité », estime toutefois Florence Arnaiz-Maumé, déléguée générale du Synerpa. Quant aux pouvoirs publics, ils ne pourront que constater « ce que les moyens octroyés ont permis de mettre en place jusqu’ici et mesurer ceux qui seront nécessaires pour atteindre les objectifs valeureux d’ores et déjà fixés », conclut Sylvie Platon.

Les dates butoirs en bref

Dates de référence

Evaluation interne

Evaluation externe

Renouvellement autorisation

Ehpad autorisé et ouvert
avant le 03/01/2002
03/01/200203/01/201403/01/201503/01/2017
Ehpad autorisé avant le 03/01/2002
et ouvert avant le 22/07/2009
03/01/2002
22/07/2009
03/01/201403/01/201503/01/2017
Ehpad autorisé après le 02/01/2002
et ouvert avant le 22/07/2009
03/01/2002
22/07/2009
Date d’autorisation
+ 12 ans
Date d’autorisation
+ 13 ans
Date d’autorisation
+ 15 ans
Ehpad autorisé avant le 22/07/2009
et ouvert après le 22/07/2009
22/07/2009Date d’autorisation
+ 5 ans
Date d’autorisation
+ 7 ans
Date d’autorisation
+ 15 ans
Ehpad autorisé et ouvert
à compter du 22/07/2009
22/07/2009Date d’autorisation
+ 5 ans
Date d’autorisation
+ 7 ans
Date d’autorisation
+ 15 ans

Ce tableau a été réalisé à partir des modalités prévues par la loi du 2 janvier 2002 rénovant l’action sociale et médico-sociale, parue le 3 janvier 2002, et la loi du 21 juillet 2009 portant réforme de l’Hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires (HPST), parue le 22 juillet 2009, ainsi que leurs décrets d’application tel que le décret du 3 novembre 2010 relatif au calendrier des évaluations et aux modalités de restitution des résultats des évaluations des établissements sociaux et médico-sociaux. A noter que pour calculer la date à laquelle doivent être, au plus tard, remises les évaluations, il faut prendre en compte celle à laquelle l’Ehpad a été créé. Ce qui implique que les établissements, tels que les foyers-logements transformés par la suite en Ehpad, doivent prendre en compte la date à laquelle l’établissement est devenu un Ehpad et non celle de création de la structure initiale, rappelle Danièle Rolland, chargée de mission au sein du département Appui à la performance de l’ARS de Bourgogne. Par la suite, les évaluations internes devront être réalisées tous les cinq ans et les évaluations externes tous les sept ans.

 


S’organiser pour mieux évaluer

Le cadre législatif et réglementaire est clair : les Ehpad doivent s’engager dans une démarche d’évaluation interne et externe qui sera prise en compte lors du renouvellement des conventions tripartites. En revanche, le cadre méthodologique dans lequel ces évaluations doivent s’inscrire reste flou. Ces difficultés ne sont toutefois pas insurmontables.

 

L’ Agence nationale de l’évaluation et de la qualité des ESSMS (Anesm) n’a pas élaboré de grille nationale d’évaluation de la qualité afin de laisser aux équipes des Ehpad le soin de créer leurs propres référentiels en fonction de l’histoire de l’établissement, du projet d’établissement et de soins mais aussi des prestations qu’il propose.

Pour surmonter cette difficulté, « les directeurs d’Ehpad peuvent s’appuyer sur quatre séries de recommandations de bonnes pratiques relatives à la qualité de vie en Ehpad publiées par l’Anesm entre 2011 et 2012, détaille Laurent Pradère, responsable national du département Accompagnement social de la personne au sein du cabinet de conseil KPMG. À celles-ci s’ajoute une recommandation parue en février 2012, intitulée L’évaluation interne : repères pour les établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes, qui explique aux établissements comment réaliser son évaluation. » Ces documents sont accessibles sur le site Internet de l’Anesm (http://www.anesm.sante.gouv.fr).

S’inspirer de référentiels existants

Laurent Pradère suggère en outre, pour gagner du temps, de s’appuyer sur les référentiels d’évaluation existants, tels que celui de la délégation territoriale de la Dordogne accessible via le site de l’ARS Aquitaine (http://www.ars.aquitaine.sante.fr), rubrique « Secteur médico-social », ou encore celui du Conseil général de la Loire (http://www.loire.fr), baptisé Véronique. Reste ensuite à adapter le référentiel choisi à la structure, en fonction de sa taille, du type de public accueilli etc. Cela peut être le rôle du directeur et du médecin coordonnateur ou, pour les établissements ou groupes d’établissements qui en possèdent, du référent qualité. Chez Korian, le directeur de la qualité a organisé quelques réunions et échanges téléphoniques avec des membres de l’Anesm pour leur expliquer la démarche du groupe et valider leur référentiel, détaille Dr François Bertin-Hugault, directeur éthique, médical et qualité au sein du groupe. Enfin, les fédérations d’établissements proposent des outils d’aide à l’autoévaluation. Mais l’ancien outil d’autoévaluation Angélique est, lui, inadapté pour l’évaluation interne.

Se préparer

L’un des principaux axes d’amélioration des pratiques en Ehpad est la formalisation des procédures, des relations avec les médecins traitants ou encore des comptes-rendus de réunions, analyse Patricia Ravinet, responsable du pôle Santé-Social au sein de l’organisme Bureau Veritas Certification. Mais les Ehpad partent rarement de zéro. La base est « d’avoir formalisé le projet d’établissement et le règlement de fonctionnement ou encore d’avoir créé un Conseil de la vie sociale (CVS), détaille Colette Marchini, directrice administrative au sein du groupe privé Idéal Résidences devenue évaluatrice. En matière de traçabilité, il faut vérifier que les dossiers administratifs et médicaux des résidents sont complets et en matière de sécurité, vérifier que les installations, telles que les ascenseurs et les portes coupe-feu, sont bien aux normes ». Et si tout ne peut pas être prêt pour la remise du rapport d’évaluation interne, l’important est d’inscrire tous les points à améliorer dans les semaines, mois voire années à venir et de fixer un calendrier prévoyant leur mise en œuvre effective.

S’adapter au manque d’effectifs et de temps

Il est parfois difficile de créer des groupes de travail pluridisciplinaires alors qu’il faut parallèlement s’occuper des résidents. D’autant que certains professionnels travaillent à temps partiel. C’est pourquoi Sylvie Platon, membre de l’AD-PA, propose « de diminuer le nombre de groupes de travail, d’étaler la démarche dans le temps, de mettre à profit des réunions de service qui existaient avant la démarche d’évaluation » ou encore, pour chaque groupe, de fixer d’emblée un nombre raisonnable de réunions. Au sein du groupe Korian, chaque établissement a fait appel à un stagiaire afin d’éviter aux membres du personnel d’effectuer des heures supplémentaires, ce qui représente un coût pour les structures sachant qu’il n’y a pas d’aide financière pour la réalisation des évaluations internes comme le fait remarquer le Dr François Bertin-Hugault.

Bien choisir son évaluateur externe

Ensuite, lors de l’évaluation externe, se pose la question du choix de l’évaluateur parmi les 1 164 organismes habilités par l’Anesm et dont la liste est accessible sur le site de l’Agence.  Pas de recette miracle sur ce point, si ce n’est de faire jouer le bouche à oreille et de bien réfléchir aux critères que l’on juge primordiaux. Pour Gabriel Cohen, directeur de l’organisme évaluateur Audit Pro, les bonnes questions à poser aux évaluateurs sont : « Comment comptez-vous associer le personnel sans mettre en place une usine à gaz ? Comment allez-vous mettre en place les indicateurs quantitatifs et quels groupes seront concernés (résidents, familles, personnels, intervenants extérieurs) ? Quelles sont vos méthodes de collecte des données ? Quels sont les outils que vous utilisez pour traiter vos données ? Quels sont les outils que vous nous laisserez pour que nous puissions réaliser nos futures évaluations internes et mesurer des écarts ? » À la fin de l’évaluation externe, le directeur de l’Ehpad peut demander un temps d’échange avec l’évaluateur avant la restitution aux équipes et un autre avant l’envoi du rapport final aux autorités de tutelle.

 

Les ARS à l’écoute des Ehpad

En dehors des réunions d’information, les Agences régionales de santé (ARS) restent à la disposition des Ehpad pour toute question technique relative aux rapports d’évaluation. Les numéros de téléphone pour les contacter sont, en général, mentionnés dans les différents courriers ou mails envoyés aux établissements. Certaines, comme l’ARS de Rhône-Alpes, prévoient des ateliers méthodologiques pour venir en aide aux établissements isolés et sans ressources. Certaines proposent aussi des aides financières, notamment pour les évaluations externes, sachant que le montant de ces dernières peut osciller entre 5 000 et 10 000 euros.

Enfin, les ARS participent à des groupes de travail communs avec les Conseils généraux de leur territoire afin d’harmoniser leurs critères d’appréciation des rapports d’évaluation qui leur seront envoyés et de faciliter le suivi des procédures. Elles fonctionnent également, quand elles le peuvent, en réseau : les ARS de Champagne-Ardenne, de Rhône-Alpes, d’Île-de-France, d’Auvergne, de Poitou-Charentes et de Bourgogne s’échangent ainsi des informations ainsi que des outils et s’entretiennent ponctuellement par mail, téléphone ou visioconférence.

 

 


 

« Une démarche participative incluant le personnel, les résidents et les familles »

Isabelle Zanolla est directrice des Volubilis, un Ehpad privé à but non-lucratif du groupe ACPPA de 102 places situé à Décines-Charpieu (Rhône). Elle a réalisé l’évaluation interne de son établissement entre avril et septembre 2012. L’évaluation externe, elle, est programmée en septembre 2013.

Ehpad magazine : Comment avez-vous lancé votre évaluation interne ?

Isabelle Zanolla : J’ai organisé plusieurs réunions pour expliquer au personnel en quoi consistait la démarche et en quoi elle était intéressante. J’ai précisé que cette évaluation s’inscrivait dans une démarche continue d’amélioration de la qualité. J’ai ainsi rappelé le contexte législatif et réglementaire de cette évaluation ainsi que la démarche qualité entreprise depuis le début des années 2000 au sein de l’association ACPPA (Accueil et confort pour personnes âgées), gestionnaire des Volubilis. J’ai aussi rappelé qu’il s’agissait d’une démarche participative incluant le personnel, les résidents et les familles.

E. M. : Comment avez-vous impliqué les résidents et leurs proches ?

I. Z. : Parallèlement aux réunions du personnel, j’ai informé les résidents, les familles et les membres de notre Conseil de la vie sociale (CVS) puis je les ai sollicités pour participer à des groupes de travail dont un relatif à la garantie des droits et à l’expression des usagers. Ce groupe a réuni 20 à 25 personnes qui ont pu s’exprimer sur le respect de la vie privée des résidents en Ehpad. Nous avons également créé un groupe de travail sur la gestion des risques de maltraitance. Je n’ai aucun cas de maltraitance dans mon établissement mais ce n’est pas un sujet tabou et nous avons pu en parler en toute intelligence avec les familles.

E. M. : Combien de groupes de travail avez-vous créés ?

I. Z. : Douze groupes ont été mis en place sur des thématiques définies par le service qualité de l’ACPPA telles que les soins et la prévention de la dépendance ou encore la restauration. Chacun de ces groupes était piloté par moi-même ou par l’un des membres de l’équipe dirigeante composée notamment de la responsable du pôle soins, de la responsable du pôle hébergement et d’une psychologue. Nous avons relevé les points positifs et les points à améliorer au sein de l’établissement et nous avons établi un plan d’action sur cinq ans subdivisé en fiches-action précises. Cela me permet d’avoir une vision claire pour les années à venir. J’ai ensuite proposé un compte-rendu écrit au personnel, aux résidents et à leurs proches.

E. M. : Vous préparez-vous pour votre évaluation externe ?

I. Z. : L’évaluation interne nous a fourni un état des lieux sur lequel s’appuyer pour notre nouveau projet d’établissement. C’est notre objectif jusqu’au mois de juin. Nous avons créé de nouveaux groupes de travail, au sein desquels participent des résidents et leurs familles. En septembre, nous ferons l’évaluation externe.

E. M. : Que souhaitez-vous améliorer ?

I. Z. : Associer et consulter un peu plus les partenaires extérieurs. Je vais ainsi, à l’occasion de notre prochaine commission gériatrique, présenter les grands axes de notre futur projet d’établissement et les médecins libéraux pourront donner leur avis sur le volet soins. Nous allons aussi nous rapprocher un peu plus des structures locales en charge de l’accompagnement des personnes âgées. Il est important qu’elles sachent, par exemple, que l’un de nos nouveaux axes de réflexion concerne l’accompagnement des malades parkinsoniens.

 


« Le médecin coordonnateur a un rôle fondamental en tant que promoteur de la qualité des soins »

Le Dr Stéphan Meyer est médecin coordonnateur et vice-président de la Fédération française des associations de médecins coordonnateurs en Ehpad (FFAMCO). Les quatre Ehpad publics dans lesquels il intervient, situés à proximité de Limoges (Haute-Vienne), ont achevé leur évaluation interne et externe en 2012.

Ehpad magazine : Quel rôle avez-vous joué lors des évaluations internes en tant que médecin coordonnateur ?

Stéphan Meyer : L’évaluation interne ne se réalise pas à huis clos entre le directeur de l’établissement et le médecin coordonnateur. Tous les services sont mobilisés pour évaluer de manière très honnête ce qui est fait et ce qu’il serait préférable de faire. En revanche, le médecin coordonnateur a un rôle fondamental en tant que promoteur de la qualité des soins dans les établissements et, au-delà, de la qualité de l’animation, des filières ou encore de la prise alimentaire. Il ne pilote pas, en principe, de groupes de travail et n’assiste pas non plus à toutes les réunions : tel un chef d’orchestre, il n’assiste pas à toutes les répétitions précédant le concert final. En revanche, il participe aux réunions intermédiaires et aux grandes réunions de restitution pour cautionner ou recadrer ce qui a été proposé.

E. M. : Quelles difficultés avez-vous rencontrées ?

S. M. : L’une des difficultés est de faire comprendre qu’il n’y a aucun jugement de valeur : l’évaluation interne est là pour évaluer les pratiques et non pour juger le personnel. Il ne faut pas créer de tensions : les équipes sont parfois en souffrance à cause des carences qui affectent leurs pratiques mais qui ne sont pas nécessairement de leur fait. Cependant, il est toujours très intéressant de prendre un peu de recul par rapport à ce que nous faisons. Car ce qui semble être acquis un jour ne l’est plus forcément par la suite. C’est le rôle du médecin coordonnateur d’être vigilant et, par le biais de réunions d’équipe, de faire en sorte que les acquis soient conservés. Or, il y a, en Ehpad, beaucoup de personnels intérimaires et de personnels qui tournent. L’évaluation interne permet de mettre le doigt sur les carences.

E. M. : Le médecin coordonnateur intervient-il lors de l’évaluation externe ?

S. M. : Lors de l’évaluation externe, une équipe extérieure à l’Ehpad intervient. A mon sens, il faut demander qu’au sein de cette équipe, interviennent un directeur d’Ehpad, un médecin coordonnateur et un cadre de santé afin d’être jugés par ses pairs qui seuls connaissent bien le secteur médico-social. Cette équipe rencontre ensuite chaque membre du personnel puis transmet un premier rapport aux principaux responsables de l’Ehpad évalué : le directeur, le médecin coordonnateur, l’infirmière coordonnatrice, le référent qualité. Ceux-ci ont la possibilité de faire des commentaires sur les points négatifs relevés et, éventuellement, d’influencer le rapport final de l’évaluateur.

E. M. : Au final, quelles pratiques ont été améliorées ?

S. M. : Dans l’un des établissements, nous avons par exemple, grâce à une idée du cadre de santé évaluateur, opté pour des chariots-douche qui, associés aux salles de bain à l’italienne dont nous disposions déjà ainsi qu’à une réorganisation en binômes des équipes d’aides-soignants, nous ont permis de gagner du temps et, au final, d’augmenter très significativement la fréquence des douches. Dans un autre Ehpad, nous avons accru le nombre d’animations proposées aux résidents présentant des pathologies démentielles, ce qui a ainsi permis de réduire le nombre d’apathiques.

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