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Joseph Krummenacher, président de la Fnapaef La Fédération Nationale des associations et amis des personnes âgées et de leurs Familles (Fnapaef) a organisé, le 5 octobre, à Châteauroux, le premier colloque des usagers. Joseph Krummenacher revient pour EHPAD MAG sur les dossiers encore brûlants, les freins encore existants dans la politique du vieillissement et l’accompagnement des personnes âgées en Ehpad.
Aucune mesure n’est prise pour diminuer le reste à charge en Ehpad
Joseph Krummenacher : Avec la loi sur l’adaptation de la société au vieillissement, il y a eu une belle envolée lyrique, culturelle, philosophique sur la question des personnes âgées mais leur réalité est loin d’y correspondre. On note certes quelques bribes d’amélioration mais les pouvoirs publics n’ont répondu qu’à 1 ou 2% des besoins.
A domicile comme en Ehpad, ce sont encore les personnes âgées et leurs familles qui doivent, encore et toujours, s’adapter à la société et non l’inverse.
La question du reste à charge galopant n’est pas réglée. Aucune mesure n’est prise pour diminuer le reste à charge et les tarifs hébergement en Ehpad sont utilisés comme variable d’ajustement. Ceci est train de s’aggraver. Rien n’est fait pour faire cesser les dépenses indues par les résidents tels que les amortissements des biens immobiliers et les charges financières afférentes. On interrogerait que la Fnapaef sur cette question, on dirait que l’on radote.
Mais à l’heure actuelle, les associations, les fédérations, et même des organismes officiels qui font des études pour les ministères tels que la Drees parviennent à la même conclusion : les restes à charge s’aggravant chaque année depuis dix ans.
La Fnapaef souhaite une facture d’hébergement dont le niveau sera en rapport avec les revenus de l’usager utilisateur et avec le montant des retraites qui lui sont allouées par les mêmes pouvoirs publics.
J.K. : On a vu au cours de cette année, certains conseils départementaux remettre en cause la globalité de l’aide sociale. Les établissements, les résidents et les familles sont, en effet, otages de la confrontation entre l’Etat (qui réduit ses dotations) et les départements. Les départements ont réclamé la gestion de l’APA à sa création.
S’ils se sont tiré une balle dans le pied, ce n’est pas aux personnes âgées d’en payer le prix. Certains départements incitent les Ehpad à passer à la déshabilitation partielle à l’aide sociale. Cela aura des conséquences lourdes. Les prêts consentis pour la construction et la restructuration seront à des taux plus élevés (pas de prêts bonifiés) et se répercuteront encore sur le tarif. Les pouvoirs publics se défaussent du problème vers le privé, on veut faire faire entrer les Ehpad dans une gestion similaire aux établissements du secteur privé lucratif.
Quel regard porté vous sur la réforme de la tarification des Ehpad dont les textes ne devraient pas tarder à être publiés ?
J.K. : Personne n’a besoin d’aller en Ehpad s’il n’a pas un problème de santé ou un manque d’assistance à domicile pour l’aider. L’entrée en Ehpad se fait par nécessité souvent médicale et non par choix. Arrêtons de parler de la dépendance, parlons de maladie. Nous souhaitons une politique de santé publique basée sur la reconnaissance du fait que toutes les pertes d’autonomies sont les consé- quences de problèmes de santé.
De fait, la Fnapaef est partisane d’un passage de 3 colonnes budgétaires, hébergement, dépendance, soins, à 2 colonnes budgétaires, le soin et l’hébergement. Deux colonnes donc, une majeure sur les soins et une sur l’hébergement selon le niveau des ressources.
Les règles sécuritaires conduisent à des aberrations. En opposition complète avec le projet personnalisé du résident. Le projet personnalisé est complètement subordonné aux règlements sécuritaires.
Et à la marge, l’aide sociale pour les personnes âgées aux revenus les plus modestes. Concrètement, la colonne soins versée par les ARS prendrait en charge tout ce qui relève du soin dont notamment 100% des frais d’aides-soignantes mais encore les aides médico-psychologiques, la kiné d’entretien général, la diététique, l’hygiène bucco-dentaire qui est la première cause de dé- nutrition, tout le linge à usage unique y compris les protections urinaires, le petit matériel médical etc…
J.K. : Les conseils de la vie sociale sont davantage considérés comme une contrainte administrative que comme un outil de la démocratie médico-sociale, une instance de partage et de dialogue capable d’ajouter au climat social et à la qualité de vie dans l’établissement. Nous souhaiterions que les écoles qui forment les futurs directeurs redonnent le sens et le bon usage du CVS.
Des établissements qui documentent et forment les représentants des résidents, des familles et des professionnels au sens et à l’usage du CVS Des établissements qui documentent et forment les représentants des résidents, des familles et des professionnels au sens et à l’usage du CVS. En cas de conflits entre l’établissement et les familles, certaines associations pourraient jouer un rôle d’intermédiaire. La question du vieillissement peine à mobiliser la société. A l’approche de la campagne présidentielle, qu’attendez-vous des candidats ?
J.K. : Hélas oui, le sujet du vieillissement est un sujet que la société n’a pas envie de voir. La synthèse des commentaires a été envoyée au ministère. On fait reposer le poids de la prise en charge sur les familles, on se défausse sur les familles. Tant que l’on n’ouvrira pas le dossier du cinquième risque, la question de l’accompagnement de la perte d’autonomie des personnes âgées ne sera pas réglée.
Propos recueillis par Diane Battista (Presse Scriptum)
Ce que la Fnapaef attend
La Fnapaef a rassemblé dans un document une série de propositions « Regards politiques : Pour que la société s’adapte vraiment au vieillissement de la population ». Voici quelques mesures attendues par la fédération. > Un dispositif d’aide sociale sans récupération sur héritage ou dans lequel le plafond de l’actif successoral serait sensiblement relevé de manière à ne pas spolier des héritiers souvent eux-mêmes en position de fragilité.
Ou encore vers une aide sociale de type allocation de complément de ressources non récupérable comme c’est le cas pour l’aide médicale gratuite.
- Une facture d’hébergement qui ne comportera pas la charge du bâti, ni les intérêts des emprunts de l’établissement. On pourrait envisager de procéder comme dans l’enseignement où les bâtiments mis à disposition sont la propriété du Conseil Départemental.
- Un tarif hébergement de base contrôlé par une autorité de régulation
- Des ratios de personnels plus importants avec 0.7 voire 1 ETP pour les sections Alzheimer et fin de vie.