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Le PLFSS 2014 est transitoire
Députée PS de Charente, Martine Pinville est aussi rapporteur pour le secteur médico-social du Projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) pour 2014. Adopté en Conseil des ministres le 9 octobre 2013, le texte est actuellement débattu au Parlement. L’élue, qui est aussi l’auteur d’un rapport sur les exemples internationaux en matière d’adaptation de la société au vieillissement, livre son analyse du budget de la Sécurité sociale pour l’année à venir.
Le Premier ministre a annoncé la mise en place d’une loi d’orientation et de programmation sur l’adaptation de la société au vieillissement dont les premiers effets seront perceptibles dès 2015. Comment cette loi sera-t-elle financée puisqu’elle n’apparaît pas dans le PLFSS 2014 ?
Martine Pinville : Le PLFSS 2014 est encore en attente de ce projet de loi. Jean-Marc Ayrault a précisé que la loi sera mise en œuvre en deux parties, une première, l’année prochaine, concernera le domicile et l’Allocation personnalisée d’autonomie (Apa) avec essentiellement des travaux sur la tarification, pour une application au 1er janvier 2015. Dans un second temps, l’effort sera mis sur l’accueil en Ehpad, notamment sur les mesures pour réduire le reste à charge des résidents. Cela signifie que les principaux financements porteront surtout sur l’année 2015 et qu’ils apparaîtront très probablement dans le PLFSS 2015.
Quels sont les amendements que vous avez proposés et qui ont été rejetés ?
M. P. : Mes collègues, les députés socialistes Christian Paul (Nièvre), Jérôme Guedj (Essonne) et moi-même avons en effet proposé plusieurs amendements qui ont été rejetés car ils aggravaient les dépenses dans un contexte budgétaire très contraint. Le premier offrait la possibilité aux Agences régionales de santé (ARS) disposant de crédits non utilisés de réaffecter ces financements, en particulier pour rénover les établissements. Le second amendement était relatif aux travaux qu’a menés Jérôme Guedj sur le Crédit impôt compétitivité emploi (CICE). Il proposait une modulation de ce dispositif qui ne bénéficie pas de manière égale aux Ehpad selon leur statut (privé lucratif, privé non lucratif, secteur public).
Enfin, le troisième amendement portait sur l’ouverture des Missions d’intérêt général d’aide à la contractualisation (Migac) au secteur médico-social privé non lucratif. Ce n’était peut-être pas, en effet, le moment de revoir tous ces éléments car ils seront étudiés à l’occasion de la future loi sur l’Autonomie. J’ai d’ailleurs moi-même, en tant que rapporteur, dû refuser certains amendements. Le but de la loi est de remettre à plat, de simplifier et de rendre plus visible le système complexe qui réglemente les Ehpad, notamment la tarification, le conventionnement tripartite et la manière de contractualiser avec les multiples partenaires.
Que stipule l’amendement qui a été adopté au sujet de l’évaluation externe ?
M. P. : Il assouplit la procédure d’évaluation externe des 40 000 Établissements et services sociaux et médico-sociaux (ESMS), en particulier ceux qui disposent de plusieurs structures (Ehpad, service de soins à domicile, accueil de jour etc.). Ces derniers pourront faire appel à un seul et même cabinet pour l’ensemble de leurs évaluations externes. C’est une mesure de simplification qui permettra aux Ehpad de faire des économies de coût et d’organisation.
Concernant le Plan Alzheimer, qu’est-il prévu ?
M. P. : Nous arrivons à la fin du Plan Alzheimer, ce qui nécessite de réaliser un état des lieux des différentes mesures proposées pour savoir ce qui a fonctionné et ce qui posé des difficultés avant de lancer un autre plan. Accueil, répit, Maisons pour l’autonomie et l’intégration des malades d’Alzheimer (Maia) à déployer… : il faut continuer à mener une politique soutenue et à anticiper pour proposer des réponses, accompagner les personnes malades ou encore travailler sur l’accompagnement des aidants. Car l’offre évolue, les structures aussi et surtout, d’ici 2020, 2 millions de personnes seront concernées en France par la maladie d’Alzheimer.
Les fédérations du secteur médico-social, notamment la Fnaqpa, regrettent une croissance de l’Objectif national des dépenses d’Assurance maladie (Ondam) médico-social historiquement basse et craignent que « cela casse la dynamique du secteur et ne permette pas la mise en place de vraies politiques ». Que répondez-vous à cela ?
M. P. : Je suis en désaccord avec cette appréciation. Quand on sait que la croissance de la France est de 0,1 %, le fait d’avoir réussi à obtenir un Ondam médico-social en hausse de 3 % démontre la volonté du Gouvernement d’adopter une politique très forte en faveur du médico-social. Je regrette cette critique car « l’on ne peut pas être seul sur une île ». Notre environnement n’est pas facile et nous sommes bien obligés d’en tenir compte.
Que répondez-vous aux critiques des acteurs du secteur quant à la Contribution additionnelle de solidarité pour l’autonomie (Casa) que l’on dit détournée de son objet ?
M. P. : C’était un engagement du Président de la République que d’adapter la société au vieillissement, de « tout mettre en œuvre pour répondre de manière concrète aux besoins exprimés par les personnes dépendantes ou en situation de souffrance de leur handicap ».
Il y a eu des rapports, une volonté affirmée et la mise en place de la Casa à compter du 1er avril 2013. Le projet de loi sur l’Autonomie n’ayant pas encore été préparé, la Casa a donc été affectée à la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie (CNSA), sur le fonds vieillesse, pour l’année 2013.
Puis, une proposition a été faite pour qu’il en soit de même en 2014 (dans le PLFSS 2014, N.D.L.R.). Je pense en effet qu’il faut une lisibilité concernant ce que l’on va faire en faveur des personnes âgées en perte d’autonomie. Mais même s’il n’y a pas d’inquiétude à avoir concernant la Casa, 100 millions d’euros provenant de cette dernière seront finalement affectés à la CNSA en 2014. Ensuite, on adaptera la Casa pour qu’elle finance l’ensemble des mesures prévues par le futur projet de loi (une pleine réaffectation de la Casa est prévue au 1er janvier 2015, N.D.L.R.).
Il y a des pistes à explorer, il faut encore un peu de temps. Même s’il faut aider les établissements, ces derniers s’intègrent dans un ensemble beaucoup plus large que l’on ne peut pas négliger.
Quelles sont les priorités de l’année ?
M. P. : Il faut voir selon le Plan d’aide à l’investissement (PAI) de la CNSA car nous savons qu’il y a des besoins importants, notamment dans le domaine immobilier. Nous travaillons sur le sujet pour parvenir à un plan correct. Mais, pour l’heure, aucune ligne budgétaire n’a été affectée au PAI.
En résumé, comment définiriez-vous le PLFSS 2014 ?
M. P. : Nous aurions bien sûr aimé qu’il y ait plus de choses. Pour ce qui est du secteur médico-social, le PLFSS 2014 est un peu transitoire car nous arrivons au terme des Plans solidarité grand âge et Alzheimer. Nous sommes sans doute à l’aube d’une nouvelle organisation et il faut que l’on en profite. Nous devons travailler beaucoup plus fortement sur le médico-social et je souhaite que cela se fasse non pas seulement dans le cadre du PLFSS mais aussi à l’aune de la loi d’orientation sur l’adaptation de la société au vieillissement. Toute notre attention est centrée sur cette loi. Nous ferons valoir nos travaux et nos volontés au Parlement. Le futur projet de loi nous donne déjà une grille de lecture pour 2014. Il s’agit d’un projet ambitieux car il couvre tous les champs de la société : le logement, les transports, l’urbanisme, la technologie, les Ehpad, le domicile etc.