Présidentielle : programme minimum
Que disent les candidats à l’élection présidentielle sur la prise en charge des personnes âgées dépendantes ? Voire sur les formules d’hébergement ? Première réponse : pas grand-chose sur leur vision des différentes offres ni sur leur articulation. En revanche, ils exposent tous leurs grandes options en matière de prise en charge. Ce n’est cependant pas dans les programmes officiels que l’on trouve la plupart de ces réponses mais dans les discours et petites phrases prononcés lors de meetings ou de déplacements de terrain. Les uns et les autres sont donc susceptibles de renforcer leurs propositions au gré de l’actualité ou de plans de campagne en jouant la carte du dévoilement progressif. En clair, la vigilance reste de mise jusqu’au bout.
Nicolas Sarkozy
Le refus de nouveaux prélèvements. Tous les ans depuis 2008, Nicolas Sarkozy annonce une réforme de la dépendance pour l’année suivante. Et puis, crise financière et surtout crise des finances publiques obligent, celle-ci est reportée. En 2011, le processus avait pourtant été très sérieusement engagé avec six mois de débat national en régions et au sein de groupes de travail. Las, en juillet dernier, le Gouvernement avait suspendu la présentation de la réforme. Jusqu’à ce que Nicolas Sarkozy annonce, dans ses habits de candidat, que les « bases de la réforme » seraient posées en 2013 « quand le déficit sera ramené à 3 % du PIB ». La réforme risque donc d’attendre encore longtemps, Nicolas Sarkozy se refusant à instaurer de nouveaux prélèvements pour financer une nouvelle prestation. Par ailleurs, il a expliqué, lors d’une interview télévisée, qu’il avait pensé, un moment, pouvoir « s’en sortir en rendant l’assurance obligatoire » mais qu’il s’était aperçu « qu’il n’y a aucun assureur qui était prêt à assumer »… Dans son programme, la question de l’autonomie est toutefois abordée dans un chapitre intitulé « Garder notre avance face aux défis de l’autonomie : handicap et dépendance ». Il y traite essentiellement du handicap. Pour les personnes âgées, le texte mentionne seulement la volonté de « développer une offre intermédiaire entre le tout-domicile et le tout-établissement, pour offrir des conditions de bien-vivre aux Français qui prennent de l’âge, et prévenir l’isolement et la perte d’autonomie ».
François Hollande
Réforme avec nouvelles contributions. Le candidat socialiste a lui aussi annoncé une réforme de la dépendance
« permettant de mieux accompagner la perte d’autonomie ».
Il l’aborde dans la mesure 18 de son petit livre-programme essentiellement consacrée au lancement d’une nouvelle négociation sur la réforme des retraites. C’est lors d’interventions télévisées qu’il a donné plus de détails. La réforme de la dépendance qu’il envisage est clairement orientée vers la mise en œuvre du principe de solidarité. Jugeant l’Apa (Aide personnalisée à l’autonomie) insuffisante, il souhaite faire appel à la solidarité nationale pour, dit-il, « assurer ce cinquième risque ». Ce qui se traduirait par une cotisation spécifique. Il s’écarte donc clairement de la voie mixte prônée par le Gouvernement actuel (un socle solidaire auquel serait ajouté un système d’assurance privée) et ne conditionne pas la réforme au rééquilibrage des comptes publics. Il ne précise toutefois pas le calendrier de cette réforme. Reste également à connaître les véritables contours de la politique de l’offre en la matière. À en croire Jérôme Guedj (lire l’interview), le Parti socialiste privilégierait deux axes : œuvrer pour améliorer la réponse à la demande majoritaire des Français, à savoir rester au domicile ; redynamiser l’offre publique d’Ehpad pour garantir sur l’ensemble du territoire des tarifs accessibles à l’ensemble des personnes âgées, quels que soient leurs revenus.
François Bayrou
La piste de l’assurance obligatoire. Constatant que « tout ou presque reste à faire face aux perspectives d’allongement de la vie et de perte d’autonomie pour le plus grand âge »,
le candidat centriste souhaite lancer un plan global qu’il appelle « Face à la dépendance » et qui activerait tous les leviers disponibles : « recherche médicale et pharmacologique, amélioration de la prise en charge dans les maisons de retraite et les hôpitaux, construction d’une offre plus abordable pour les familles, appui aux aidants et mise en œuvre de la solidarité nationale ». Pour ce qui est du financement, il se prononce donc pour une combaison entre « solidarité nationale » et
« mutualisation du risque » sous forme de produit de prévoyance. En somme, il prône un mode de financement mixte, quasiment identique à celui qui avait été envisagé initialement par le Gouvernement actuel, mais qui a visiblement été abandonné depuis.
Jean-Luc Mélenchon
Solidarité nationale et service public. Le candidat du Front de gauche se distingue nettement des autres candidats en faisant des propositions basées sur deux principes : pas de recours à l’assurance privée et montée en puissance d’un véritable service public d’accompagnement.
Cela se traduit par deux propositions :
– La « création d’une cinquième branche de la Sécurité sociale visant à prendre en charge le risque de la perte d’autonomie/dépendance s’appuyant sur les principes fondateurs de la Sécurité sociale, à savoir que chacun cotise selon ses moyens, mais reçoit selon ses besoins ».
– La « création d’un service public national de l’aide à domicile visant à offrir un service de qualité et de proximité sur l’ensemble du territoire (rural et urbain) et éradiquer l’extrême précarisation du secteur ».
Eva Joly
Un débat pour 2013. Les personnes âgées dépendantes et
leur prise en charge ne sont traitées qu’en termes génériques dans le programme d’Eva Joly. Elle considère toutefois « que la dépendance et la question du 4e âge sont un sujet de société ». Elle se propose en outre d’organiser un grand débat sur l’autonomie des personnes âgées et sur les conditions de leur maintien à domicile, qui doit aussi permettre « de définir les rôles de la société et de la famille par rapport aux seniors ».
Ce débat devrait aboutir à une loi de réforme en 2013
qui « organisera et financera la prise en charge de la dépendance ». La candidate écologiste envisage de recourir à l’augmentation de la CSG pour financer les mesures nécessaires. Ces réponses parcellaires sont à considérer à l’aune du programme global des écologistes profondément orienté vers un « vivre autrement ».