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Santé bucco-dentaire en Ehpad Non classé

Une nécessaire prise de conscience

La vie en institution a comme effet préjudiciable de réduire le recours au chirurgien-dentiste de près de 25 %, selon une enquête publiée le 5 mars dans le Bulletin épidémiologique hebdomadaire (BEH). Pour Philippe Hugues, membre du bureau de la Société française des acteurs de santé publique (ASPBD), il faut former les personnels des Ehpad et faire évoluer la perception de l’impact de la santé bucco-dentaire sur la santé générale.

Une infection buccale causée par des bactéries peut déboucher sur une infection généralisée de l’organisme déjà affaibli chez les personnes âgées. Elle peut toucher le cœur et provoquer une inflammation autour du muscle cardiaque (endocardite), voire des poumons et dégénérer en pneumonie. Elle peut aussi augmenter le taux de glycémie et déstabiliser un diabète. De plus, les douleurs ressenties au niveau des dents ou des gencives augmentent le risque de dénutrition et « limitent la mastication et, donc la salivation, ce qui réduit la protection naturelle des dents apportée par la salive », ajoute Benoît Perrier, Secrétaire général de l’Union française pour la santé bucco-dentaire (UFSBD). Ce qui accroît autant le risque d’infection. Sans oublier que ces douleurs ont des conséquences sociales, dues à des difficultés d’élocution, et psychologiques, liées à une perte d’estime de soi causée par des dents délabrées.

Bilan de compétences

Philippe Hugues, de l’ASPBD, propose la mise en place d’un projet d’établissement assez large englobant la santé bucco-dentaire. « Il est important de faire un bilan bucco-dentaire dès l’entrée des personnes âgées en Ehpad. Or, cela est encore trop rarement le cas », déplore-t-il. Une tâche incombant au médecin coordonnateur. Il conseille en outre de vérifier que les infirmiers et les aides-soignants de chaque établissement ont les compétences suffisantes pour entretenir correctement les prothèses dentaires des résidents, garantir la qualité du brossage des dents (cinq minutes par jour, matin et soir) et repérer certaines pathologies dès leur apparition.
Si tel n’est pas le cas, le responsable de l’ASPBD suggère de leur proposer des formations spécifiques. L’objectif : combler les lacunes et « mettre en place un protocole au sein de l’Ehpad afin de déterminer qui fait quoi et comment, détaille Philippe Hugues. L’idéal est de nommer un référent, un infirmier ou un cadre de santé, chargé de piloter de façon pérenne le projet bucco-dentaire au sein de l’établissement ». Celui-ci suivra éventuellement une formation un peu plus poussée et transmettra ses connaissances au reste de l’équipe
soignante.

Réseaux associatifs et hôpitaux

Les formations peuvent être assurées par l’UFSBD. Elles ont un coût : 1 210 euros pour une intervention de sept heures auprès d’un groupe de 8 à 12 personnes. Elles peuvent toutefois être financées par un Organisme paritaire collecteur agréé (OPCA). L’UFSBD collabore déjà avec des syndicats de directeurs d’Ehpad, comme la Fnadepa, et des groupes tels qu’Orpéa, Korian et Médica afin de systématiser les formations continues. Mis à part l’UFSBD, d’autres associations proposent des formations aux personnels des Ehpad, qu’elles soient payantes, comme celles de l’association Santé orale, handicap, dépendance et vulnérabilité (Sohdev) en région Rhône-Alpes, ou gratuites. Ainsi, dans le Limousin, une trentaine de chirurgiens-dentistes se relaient au sein de l’association Ehpadent afin d’assurer des formations et des bilans dentaires sans frais pour les maisons de retraite.
Les Ehpad ont, en outre, tout intérêt à profiter des ressources offertes par les structures hospitalières, ce que confirme Marie-Hélène Lacoste-Ferré, chirurgien-dentiste au sein du pôle Gériatrie du Centre hospitalier universitaire (CHU) de Toulouse. « À l’occasion d’une Évaluation des pratiques professionnelles (EPP) au sein du CHU en 2007, nous avons travaillé sur la meilleure façon de prendre en charge la santé bucco-dentaire des patients âgés accueillis en unité de long séjour, explique-t-elle. Nous avons élaboré un protocole assez complet mais simple d’utilisation détaillant la démarche à suivre pour nettoyer la bouche du patient, qu’il soit coopérant ou pas, qu’il ait une prothèse ou pas etc. » Ce document a ensuite été, à la demande de l’Agence régionale de santé (ARS) Midi-Pyrénées, diffusé auprès des Ehpad de la région, soit près de 140 établissements en trois ans, et sert ainsi de support pour des formations théoriques et pratiques financées par l’ARS.

Un cabinet dentaire en Ehpad ?

Une aubaine pour les maisons de retraite car avec les progrès de la médecine, de plus en plus de personnes âgées conservent quasiment toutes leurs dents, ce qui implique un entretien et un suivi réguliers. Et tous les Ehpad ne peuvent disposer, comme l’Ehpad Saint-Séverin, situé à Château-Landon (Seine-et-Marne), de leur propre cabinet dentaire car cela représente un coût d’installation de quelques dizaines de milliers d’euros. Dans cet établissement, un chirurgien-dentiste intervient tous les quinze jours et le paiement des soins est assuré par le résident dans les mêmes conditions que celles pratiquées dans un cabinet de ville.

Nathalie Ratel

 

Nouvelle opération « Aimez vos dents ! » en Ehpad

Pour la deuxième année consécutive, le Synerpa et l’Union française pour la santé bucco-dentaire (UFSBD) ont organisé la Journée nationale de la santé bucco-dentaire en maison de retraite, dans le cadre de l’opération « Aimez vos dents ! » Les quelques 130 Ehpad volontaires ont eu le choix d’organiser cette journée entre le 4 et 11 avril moyennant un montant de 390 euros. Au sein de chacun d’eux, un chirurgien-dentiste de l’UFSBD a animé des ateliers pédagogiques sur le brossage et l’alimentation. Il a également échangé avec les infirmiers et aides-soignants pour « leur montrer, à travers des séries de diapositives et de jeux de questions-réponses, le rôle qu’ils peuvent jouer auprès des personnes âgées afin d’améliorer leur hygiène bucco-dentaire et, au-delà, leur qualité de vie », explique Benoît Perrier, Secrétaire général de l’UFSBD. Et Florence Arnaiz-Maumé, déléguée générale du Synerpa, de renchérir : grâce à cette opération, « nous souhaitons que la santé bucco-dentaire, mentionnée dans la quasi-totalité des Schémas régionaux d’organisation des soins (SROS), devienne un sujet majeur pour les maisons de retraite. »

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