La technologie, oui mais à quel prix ?
Indéniablement, la technologie devrait être accessible à tous. En théorie. Car il reste la question, délicate mais incontournable, de son financement. Doit-il relever des pouvoirs publics ? Faut-il au contraire laisser le choix de gestion à chaque établissement ? Les résidents doivent-ils en prendre en charge une partie ? Le sujet fait débat.
« La technologie est un beau challenge : il y a là un vrai levier de management qui peut permettre de réfléchir en équipe sans révolutionner pour autant complètement les pratiques. C’est un fait. Mais, au-delà, se pose effectivement la question de savoir comment un Ehpad peut absorber cet investissement dans son budget. Aujourd’hui, c’est le nerf de la guerre », constate Adeline Leberche, Directrice du secteur social et médico-social à la Fehap. Et d’ajouter qu’il « n’y a pas aujourd’hui de crédits alloués à l’investissement. Pourtant, nous avons effectivement des Ehpad qui vieillissent. Alors, aujourd’hui, quand on peut investir, la priorité va au bâti et non pas aux nouvelles technologies même si l’on est tous d’accord sur le fait qu’elles peuvent être bénéfiques aux résidents et aux professionnels. »
Hors de question également de puiser dans le reste à charge déjà fort lourd pour la plupart des résidents et de leurs familles : « Le reste à charge est déjà bien assez élevé pour ne pas en rajouter, affirme Alain Seknazi, Directeur général adjoint du secteur médico-social dans le groupe Domus Vi. Mais il est possible, par exemple si l’investissement technologique est amorti sur les restes à charge de quatre-vingts résidents, que cela se révèle plus accessible. »
« Une diffusion de masse de ces dispositifs pour minimiser l’impact sur le coût »
Un point de vue également défendu par Christophe Delas, Directeur général délégué de la direction Stratégie et Développement du groupe Colisée : « On a atteint une espèce de point de non-retour quant à l’utilisation des finances publiques qui ne nous permet pas de faire sponsoriser ces dispositifs par la collectivité. En revanche, si l’on veut minimiser l’impact sur le coût qui reste à charge des personnes âgées et de leurs familles, il faut une diffusion de masse de ces dispositifs. Par exemple, la téléphonie mobile : lors de ses prémices, un appel coûtait une fortune ! Puis, l’effet de nombre a permis d’en diminuer les coûts. De la même manière, il faut miser sur une stratégie de masse. » Ou, comme le conseille Patrick Mallea, Directeur du CNR Santé, « penser l’investissement technologique dès la création ou lors de la rénovation d’un établissement, quitte à intégrer aux coûts d’exploitation une prime pour inciter et rassurer les financeurs en arguant notamment du gain de sécurité notamment ».
Et Jean-François Goglin, conseiller en système d’information de santé à la Fehap, de conclure : « Aujourd’hui, d’une manière globale, les établissements médico-sociaux consacrent à l’investissement entre 0,7 et 0,8 % de leur budget global, ce qui est très peu. Un objectif satisfaisant serait déjà d’atteindre 2 %. Mais il est impossible de rogner sur le prix de journée. Comment donc parvenir à cet équilibre ? En s’appuyant sur les évolutions réglementaires qui, elles, sont obligatoires. »